Anna, Ulysse et leurs parents sont sur un bateau : la vie en Bulle

 BulleBateauPartir, aller vers autre chose, d’autres pays, d’autres cultures. Quitter, son travail, son confort, ceux qu’on aime… Partir, nous l’avons fait une première fois en bateau, tous les deux, pour un tour du monde, départ d’Arcachon en septembre 2005, arrivée à Toulon en décembre 2007, en passant par le Cap Horn et la mer Rouge. C’est là que nous avons attrapé le virus. Enfin, moi surtout, car Luc l’a depuis l’enfance, ses parents eux aussi avaient un bateau…

Une fois atteints par ce virus, il n’y a pas d’antidote : l’envie de repartir est irrésistible. Il nous a quand même fallu 6 ans avant de reprendre la mer sur un nouveau bateau. Le bateau de nos rêves, Bulle, un voilier en aluminium de 17 mètres de long.

Six ans, le temps de voir naître nos deux enfants, Anna et Ulysse. Le temps de remplir la caisse de bord à Paris. Luc est ingénieur, responsable export d’une PME et moi juriste dans une maison d’édition.BulleRoques

Le temps d’acheter le bateau et de le retaper entièrement, nous passons les week-ends et les vacances scolaires au chantier Normandy Yacht Service de Caen à bricoler sur Bulle et à le préparer à naviguer sous toutes les latitudes.

Le temps aussi de trouver un moyen de gagner de l’argent tout en voyageant. Nous choisissons le charter, être bateau hôtel, partager notre vie de nomades avec les gens en quête d’aventures.

Repartir, avec deux enfants cette fois-ci. Notre projet suscite la curiosité :BulleFamilleATerre

« Vous n’avez pas le mal de mer » ?

« Comment faites vous en cas de tempête » ?

« Vous n’avez pas peur de tomber à l’eau » ?

« Et les enfants, vous les attachez » ?

« Et pour l’école, vous suivez un programme » ?

« Vous croisez des pirates » ?

« Vous n’avez pas peur de vous ennuyer » ?

D’ailleurs, beaucoup de gens arrivent à la conclusion que notre projet est super mais qu’ils ne le feraient pas ! Certains même y sont opposés.

Ne pas se laisser freiner par les autres. Nous avons la chance de pouvoir choisir la vie que nous souhaitons mener. C’est la vie en bateau que nous choisissons. Un retour à l’ère primitive, certes, où l’eau douce et l’électricité sont comptées, où les préoccupations majeures de l’homme sont l’entretien du navire et la pêche, et celles de la femme l’éducation des enfants et la préparation des repas avec de rares denrées fraîches. Mais quelle vie ! Quelle liberté !

BulleAnnaUlysse a 2 ans et Anna 5 ans quand nous mettons Bulle à l’eau en décembre 2012. Notre première navigation est plutôt tranquille mais fraîche car nous descendons, en plein hiver, les canaux de Caen jusqu’à Port Saint Louis du Rhône en passant par la Seine, la Saône et le Rhône avec le mât calé sur le pont. Deux cents écluses plus tard, nous passons l’été en Corse et enfin nous prenons le large, cap sur le Pacifique où nous souhaitons naviguer quelques années.

Chacun prend vite ses marques. De manière générale, les enfants s’adaptent bien plus vite que les adultes à tout nouvel environnement. A peine embarqués, Anna et Ulysse jouent déjà aux playmobils dans leur cabine comme s’ils avaient toujours habité sur un bateau.

Tous les matins, nous faisons l’école, deux heures environ. Pas facile tous les jours pour « la maîtresse en maillot de bain » de garder son calme et de motiver son petit monde, la fermeté, la douceur, les menaces, tout y passe. Les enfants se permettent bien plus de choses avec leurs parents… Finalement Anna et Ulysse apprennent à lire et écrire grâce à nous et nous aimons à penser que la vie en bateau leur apprend à être autonomes, à s’adapter à toute sorte de situation, à être plus ouverts à la différence et à parler d’autres langues.BulleUlysse

Nous passons une grande partie de notre temps en navigation. Notre record en pleine mer sans voir la terre est de 33 jours entre Valparaiso et la Polynésie pendant notre premier tour du monde. Avec les enfants, nous avons navigué 16 jours sans escale entre les Galapagos et les Marquises. En mer, nous pêchons, nous lisons beaucoup, nous jouons aux cartes, aux jeux de société et regardons des films. La nuit, nous faisons nos quarts à tour de rôle, deux à trois heures chacun en fonction des conditions météo, pendant que nos petits mousses dorment sur leurs deux oreilles. A moins que le temps se gâte, que nous naviguions près des côtes ou sur une route commerciale fréquentée, le quart de nuit est un moment de grâce, seul au milieu de l’océan, sous un ciel étoilé, avec un bon bouquin, accompagné par le souffle des dauphins…

BulleKitesurfTerre en vue ! Le snorkling avec les tortues des Grenadines, les sessions de kite et de planche à voile aux Roques (Venezuela), la rencontre avec les indiens kunas aux San Blas, la découverte de la faune des Galapagos, la chasse aux œufs de sternes aux Marquises, la dégustation des crabes de cocotiers aux Tuamotu, les danses traditionnelles des habitants de Lamotrek, les plongées à sensation à Palau, l’exploration en canoë des lagons de Palawan, la rencontre avec les dragons de Komodo, le ballet des raies manta au Raja Ampat, les parties de chasse sous-marines à Helen Reef, les concours de sauts à l’arrière du bateau…

Et à chaque escale, Bulle se remplit, et les familles de passage partagent nos aventures.

BulleFamilleDéguiséeAujourd’hui, Anna a 8 ans et Ulysse bientôt 6 ans, nous sommes aux Philippines et nous nous apprêtons à rejoindre Palau pour une croisière plongée.

Nous aimons cette vie de nomade. Avoir le luxe de choisir notre chemin, de changer notre programme au gré de nos envies. Nous rêvons aux prochaines escales. Bientôt la Thaïlande, le Japon, l’Alaska, le Mexique, pourvu que cela dure encore quelques années… Nous n’avons pas décidé d’une date de fin mais nous envisageons un retour à terre possible pour l’entrée au collège d’Anna. Tous les pays sont envisageables à condition de ne pas être trop loin de la mer !

BulleCrique

Suivez les aventures de Bulle sur son site.
La vie d’Anna et Ulysse sur Bulle en vidéo, sur Wanderfull, le blog de Raphaëlle : c’est ICI.

L’école à bord de notre voilier

Quand nous sommes partis, Ulysse avait deux ans et Anna cinq ans. Ulysse n’a donc jamais connu « l’école classique » avec une vraie maîtresse, une classe pleine d’élèves, la récréation avec les jeux de ballons, les lancers de toupies ou les échanges de cartes Pokemon. Anna est allée à l’école deux ans en petite et grande sections de maternelle et a encore des souvenirs de ses maîtresses, de ses amis et des jeux qu’elle faisait avec eux. Cet aspect social lui manque beaucoup. Heureusement à cet âge, la capacité d’adaptation des enfants est étonnante et bien supérieure à la nôtre et l’école à bord est vite devenue « l’école classique ».

Sur Bulle, nous travaillons environ deux heures tous les matins, entre 8 heures et 10 heures, sans tenir compte des mercredis, samedis, dimanches et jours fériés car lors des traversées en mer, la météo peut mettre les estomacs à rude épreuve et empêcher l’école pendant plusieurs jours. Et puis nous avons souvent du monde à bord car nous faisons du charter et se sont des périodes sans école pour Anna et Ulysse.

Le reste du temps, il faut donc être assidu et ne pas mollir. Il n’y a pas de méthode idéale, tout dépend du tempérament et de l’âge des enfants. En France, nous avons la chance d’avoir un bon système d’enseignement par correspondance : le CNED (centre national d’enseignement à distance) qui permet de suivre les cours de l’année scolaire et d’avoir le certificat de passage en année supérieure à distance. Malheureusement, le CNED impose un rythme strict et peu flexible, ainsi qu’une bonne connexion internet et une adresse postale pour envoyer et recevoir les cours et les corrections qui pèsent très lourd. Pas simple pour des nomades comme nous.

Nous avons donc choisi de suivre le programme de l’éducation nationale sans passer par le CNED. Avant de partir, nous avons pris les conseils d’enseignants et comparé les méthodes employées dans différentes écoles publiques ou privées. Ulysse et Anna ont tous les deux appris à lire sur le bateau avec la méthode phonétique et gestuelle de Suzanne Borel-Maisonny « Bien lire et aimer lire ». Nous utilisons également les ouvrages scolaires « un monde à lire  avec Kimamila » chez Nathan. En mathématiques, nous suivons la méthode Boscher aux éditions Belin, conforme au programme et très ludique. Lorsque nous avons une bonne connexion internet et pour faire le point sur leurs connaissances, nous allons sur le site du CNED www.academie-en-ligne.fr et le site www.laclassebleue.fr qui mettent en ligne gratuitement des outils scolaires très complets de la maternelle à la terminale. Enfin, nos proches qui ont des enfants du même âge, nous transmettent les exercices de maths, les dictées ou les poésies du moment…

Évidemment le travail ne se passe pas toujours dans le calme et la sérénité. C’est déjà compliqué en temps normal d’assister son enfant pour les devoirs à la maison, alors lui faire l’école soi-même n’est pas une sinécure. D’autant plus qu’ils se permettent bien plus de choses avec leurs parents. Pas facile de les captiver tous les jours, ils se lassent vite, leur temps de concentration est court, il faut donc varier les exercices, garder son calme mais être ferme. Facile à dire… Pour motiver nos troupes, nous avons instauré un système de tampons vert ou rouge. Si l’école se passe bien le tampon du jour est vert et au bout de sept tampons verts, ils ont une récompense. Nous avons donc caché dans les cales toutes sortes de petites surprises (BD, livres, jeux, etc.) et, jusqu’ici, ce système porte ses fruits et nous n’avons que rarement utilisé le tampon rouge.

La vie sur le bateau et nos nombreuses escales sont aussi l’occasion d’étudier les « sciences de la vie » : la vie des indiens Kunas aux San Blas, la formation des îles volcaniques et des atolls en Polynésie, les espèces en voie de disparition comme les orangs outans de Bornéo ou les tortues des Galapagos, les latitudes et les longitudes au passage de l’Equateur, la ponte des tortues vertes à Helen Reef, la famille des cétacés au passage d’une baleine, la conduite de l’annexe, la confection du pain, les différentes monnaies et leur taux de change, le monde sous marins et ses habitants, l’observation des étoiles, le recyclage des déchets, l’importance de l’eau douce et de l’énergie et surtout l’apprentissage de nouvelles langues.

Aujourd’hui, Anna et Ulysse ont 8 ans et 6 ans. Ulysse rechigne un peu lorsqu’il s’agit de faire des lignes d’écriture mais il est incollable sur la taille et le poids de la baleine bleue ou la technique de pêche du calamar ! De son côté Anna n’est pas férue de tables de multiplication et préfère dévorer les livres, explorer les lagons en canoë ou nager avec les raies manta. Il leur arrive même de se mettre tout seuls au travail au réveil, avant le petit déjeuner, pour finir l’école plus vite et pouvoir vaquer à leurs occupations ! Ils sont très complices et nous les voyons s’épanouir, participer pleinement à la vie du bateau, être plus autonomes, curieux et ouverts d’esprit. C’est une expérience familiale unique.

Julie Jurien

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