Comment parler avec ses enfants d’un événement critique en expatriation ?

DISCUSSION ENFANTS

Crise politique, événement tragique dans le pays où vous vivez, tremblement de terre, situation dramatique liée à l’écologie… La vie à l’étranger expose parfois à des situations sur lesquelles il n’est pas possible d’avoir une emprise directe. Comment réagir avec ses enfants ? Comment parler de cela avec eux ? Adélaïde Russel, psychologue, revient sur ce thème.

Les événements de vie traumatiques en expatriation

La vie à l’étranger expose parfois à traverser des situations dramatiques, qui peuvent avoir pour origine diverses raisons externes (écologiques, climatiques, économiques, politiques, sanitaires, sociales) sur lesquelles il n’est pas possible d’avoir une emprise directe. Le sentiment d’impuissance peut être exacerbé lorsqu’on est à l’étranger, dans un pays d’accueil. Certaines régions du monde sont plus exposées à ces risques et en découle une organisation de vie spécifique, l’intégration de règles et de procédures de sécurité au quotidien, le suivi de formations de prévention. Ces aspects de risques dans la vie courante ne peuvent être niés et doivent toujours être abordés avec l’enfant, à hauteur de sa capacité d’entendement bien-sûr.

Des événements surgissent aussi parfois dans des circonstances inattendues, entrainant un écho plus ou moins traumatique pour l’enfant. La situation peut éveiller en lui de l’anxiété et/ou du ressentiment et il est bon de pouvoir en parler avec lui le plus sereinement possible.

La sincérité à la base de toute discussion en famille

Le parent qui aborde ce sujet avec son enfant doit être au clair sur ses propres sentiments face à ce drame et à l’ampleur de la préoccupation ou de l’angoisse qu’il ressent. Sonder en soi la résonnance de la crise, l’impact de la déstabilisation ou de la vulnérabilité éveillées, l’intensité des émotions, est une bonne base de départ. Tout ne doit pas être dit à l’enfant qui doit être préservé dans son immaturité affective. Cependant un bon moment d’échange satisfaisant pour les deux parties réside dans l’attention et le partage d’une réelle authenticité émotionnelle.

Les faits de la réalité doivent être présentés tels qu’ils sont, sans mensonge, avec plus ou moins d’explications suivant la capacité de compréhension de l’enfant ou du jeune. La confidence affective est un moment plus délicat. Le parent peut dire de façon mesurée ce qu’il vit et stimuler l’échange. Il invite l’enfant à s’ouvrir sur ses sentiments et le sensibilise à l’empathie, cette capacité à se mettre à la place de l’autre et ainsi à mieux le comprendre et l’accepter. Un apparent désintérêt total de la situation de la part de l’enfant doit être respecté par le parent car cela peut être une protection. Face à cette forme de déni qui s’avère efficace, le parent peut formuler une disponibilité ultérieure pour reprendre la conversation lorsque l’enfant en exprimera le souhait.

L’autre extrême peut être une réaction émotionnelle excessive teintée d’angoisse avec une identification et une projection exacerbée chez un enfant capable d’empathie et très sensible. Entre le rien et le trop, toute la palette de réaction émotionnelle est possible.

Le parent dans son rôle protecteur

Encourager l’enfant à aller au bout de ce qu’il a à exprimer puis reprendre les éléments avancés sur une tonalité réaliste mais rassurante. Les faits arrivés aussi terribles soient-ils, ne peuvent pas être changés. On ne sait pas ce qui peut arriver dans une vie, la surprise et l’injustice sont toujours de la partie.

En revanche, la solidarité, la compassion et la qualité des liens et des échanges entre les personnes peuvent aider à mieux vivre les situations. L’enfant doit ressortir de la conversation avec la conviction que quoi qu’il puisse se passer, son parent et les adultes proches qu’il connaît et qu’il a investis affectivement, sont des protecteurs. Ce sont des personnes matures, plus fortes que lui, qui l’aiment et qui feront tout leur possible pour s’occuper au mieux de lui quelque soient les circonstances traversées. Tout enfant peut comprendre le message qu’il pourra toujours trouver protection, accompagnement, soutien et réconfort chez des personnes adultes bienveillantes. Cette pensée atténue l’insécurité affective de l’enfant, due à son impuissance face aux faits et à son immaturité, cette dernière qui l’empêche de trouver totalement en lui tout seul la sécurité. Il doit donc être sûr de pouvoir s’appuyer sur l’image mentale de figures adultes rassurantes.

La capacité à rebondir et la réparation

Si l’enfant est plus âgé, l’échange verbal peut aussi s’enrichir de réflexions appropriées en parlant de thèmes existentiels, des valeurs, des projets, de grandes figures qui vont guider ses choix de vie. Transmettre le message que c’est seulement lorsqu’une épreuve a été traversée qu’il est possible de connaître la profondeur de ses ressources personnelles. Et que face à la difficulté il est possible d’éprouver alors en soi des capacités jamais soupçonnées, des énergies et des forces mobilisées.

C’est aussi cela se construire : avancer malgré les difficultés ou les drames de la vie et savoir que l’on a en soi la possibilité d’y faire face et l’entourage pour nous amener à y réussir. C’est ce que le psychiatre Boris Cyrulnik a défini dans son concept de « résilience » qui aborde cette capacité à rebondir que possèdent la plupart des personnes. Puis, comme il y a à la fois le meilleur et le pire en l’être humain, la discussion peut s’orienter vers la thématique de la réparation en abordant des modèles positifs, des actes constructifs.

Cet aspect plus entraînant permet d’introduire une notion de maîtrise à son niveau, dans sa vie à soi, sur des faits extérieurs non maîtrisables et source d’angoisse.

Adélaïde Russell (mise à jour de l’article : novembre 2021)

AR

Merci à Adélaïde Russell. Psychologue, elle accompagne en vidéo consultation des enfants et adultes expatriés.
En savoir plus sur www.expatfamille.com – Elle est par ailleurs co
-auteure avec Gaëlle Goutain de deux guides pratiques sur la vie expatriée :

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