Les Français de l’étranger et la communauté solidaire

Les Français de l’étranger représentent près de deux millions de personnes réparties à travers le monde, de façon plus ou moins permanente. Cette communauté exporte avec elle un bagage hétéroclite de problématiques culturelles et identitaires, ainsi qu’un attachement au pays d’origine souvent complexe.

Certains maintiennent fortement leur engagement à la France à travers leurs connexions, leurs actions ou leurs visites. D’autres préfèrent au contraire compléter d’une distance émotionnelle la distance géographique.

Partir vivre à l’étranger ne signifie pas uniquement se déplacer ailleurs. Mais cela implique également se positionner par rapport à une provenance, une histoire, une culture, des racines et des compatriotes avec qui nous partageons une partie de tout cela.

Expatriés ou migrants ?

Les Français vivant en dehors des frontières nationales se considèrent parfois expatriés, parfois migrants.

Serge Tisseron précise :

« un expatrié est un individu résidant dans un autre pays que le sien. Toute personne qui part de son pays pour travailler dans un autre devrait donc être qualifiée d’expatriée. »

Le terme d’expatrié est ainsi fréquemment utilisé dans son sens étymologique latin signifiant « exo » (en dehors) et « patrida » (pays).

Quand :

  • le désir de retour n’existe pas, il s’agit davantage d’une migration
  • ce retour est impossible, il s’agit alors d’un exil.
  • les déplacements internationaux sont récurrents, on évoque alors l’idée de nomadisme contemporain.

A une échelle plus sociologique les Français de l’étranger sont une sorte de communauté identifiable quelque soit le ressenti subjectif de chacun vis-à-vis de son pays d’origine.

Loin des yeux, loin du cœur ?

Le processus de la rencontre culturelle se met souvent en place en quatre étapes. La première est celle de « la compétition » entre les différentes cultures où on compare et on évalue les différences.

Puis vient « le conflit » avec une sorte de rivalité culturelle, jusqu’à ce qu’une « accommodation » permette de calmer le conflit grâce à un ajustement des habitudes.

Enfin, une dernière étape peut être présente qui est celle de « l’assimilation » où la culture d’origine est absorbée dans la culture locale.

A une échelle plus individuelle, en modifiant notre environnement, une discontinuité peut émerger entre ce que nous avons été et ce que nous sommes dorénavant. Il apparaît parfois une évolution personnelle souple alors que d’autres fois il s’agira plutôt d’un profond changement identitaire.

Différentes réactions peuvent se retrouver quant à l’ajustement dans le pays.

Certains décident de miser sur une intégration totale dans le nouveau pays, avec parfois un rejet absolu de la communauté d’origine. « L’objectif est de rencontrer exclusivement des personnes issues de la culture locale. Rejeter ses concitoyens peut parfois signifier rejeter une partie de soi. Un des dangers qui en résulte est un clivage avec une idéalisation des locaux – préjugés positifs – au détriment des concitoyens – préjugés négatifs. ». Ce clivage touche aussi un passé sur un présent, un héritage sur un devenir.

D’autres décident au contraire de rester avant tout entre Français, dans une sorte de vie en vase clos, en marge de la réalité sociale locale « A la fois ni tout-à-fait en France, ni tout-à-fait dans le pays local, une organisation sociale un peu hybride s’installe. La frustration et l’insatisfaction de n’être ni ici ni là-bas peut toucher le moral et donner lieu à des déprimes. » Le manque d’ouverture et d’adaptabilité peut témoigner d’une difficulté pour remettre en question ses acquis et accueillir la nouveauté.

La patrie dans la valise

Partir à l’étranger à notre époque a néanmoins modifié notre relation à l’absence et à la distance. Les nouvelles technologies permettent dorénavant de maintenir un flux important d’échanges entre les différents pays, notamment entre celui d’où l’on vient et celui où on vit. Être là ou pas n’est plus nécessairement lié à une présence physique mais davantage à une disponibilité. Les relations avec les proches restés au pays peuvent être maintenues quasiment en temps réel de même que l’information sur ce qui se passe dans le pays.

Une nostalgie apparaît néanmoins parfois qui se traduit par une souffrance liée à l’absence de ce qui a été laissé.

« Ce que l’individu retrouve de son passé, ce sont des repères, une sorte de cartographie de son parcours de vie qui l’emmènent jusqu’à ce présent à trous où se sont immiscés des doutes, des manques, de l’inconnu et des incertitudes.» Quand des drames surgissent en France, les différences de positionnement de chacun quant au pays s’atténuent bien souvent au profit d’une cohésion sociale et un sentiment d’appartenance ravivé. Un élan solidaire prend alors le dessus et puise parfois dans la culpabilité commune d’avoir quitté un pays en peine et des proches en danger. « Même loin, au-delà des frontières, nous faisons corps et nous sommes alors unis dans la tourmente. Au-delà d’être français de l’étranger nous sommes avant tout français. Au-delà d’être français nous sommes avant tout humain. Et en tant qu’humain, c’est dans la célébration de la vie que nous existons et nous nous rebellons ». (intelligence-nomade.com)

Les Français de l’étranger sont le plus souvent unis dans la revendication de leur héritage culturel et patrimonial.

La quête des aliments français, les spectacles qui font salle comble quand un ressortissant nous rend visite, le plaisir d’échanger dans une langue commune ou bien le désir de transmettre nos traditions à nos enfants, tout cela exprime cette cohésion de la communauté francophone quant bien même il existe une méfiance du communautarisme excessif et le désir de s’émanciper dans la distance.

Les citations proviennent du livre « Réussir sa vie d’expat » de Magdalena Zilveti Chaland, éditions Eyrolles.

Par Magdalena Zilveti Chaland

Magdalena est psychologue-coach et l’auteur d’un livre sur les dessous psychologiques de l’expatriation « Réussir sa vie d’expat. S’épanouir à l’étranger en développant son intelligence nomade» aux éditions Eyrolles.

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