Divorcer à l’étranger, témoignage et conseils pour s’en sortir

divorcer-a-letranger-temoignageL’expatriation, une opportunité à deux

En 2007 l’opportunité de partir en expatriation à Singapour s’est présentée. Pour ma part, une carrière déjà bien remplie dans l’industrie hôtelière, pour mon époux des perspectives d’évolution assez faibles en France. C’est donc sans hésitations et sans regrets que nous nous sommes lancés dans l’aventure. Ont suivi 8 années formidables d’expatriation choisie à Singapour et deux années effroyables d’expatriation subie (pour moi) en Chine.

Le choc de la séparation

Puis la séparation imprévisible et d’une violence inouïe. Comme dans n’importe quelle séparation, l’abattement et la sensation de fin du monde sont les premiers sentiments. Cependant, la perception négative d’une rupture est décuplée en expatriation: l’éloignement, la perte de vos repères, réaliser la précarité de sa situation, ne pas savoir vers qui se tourner ou comment régler les problèmes purement matériels du quotidien, sont autant d’éléments exacerbés de par son statut de « conjoint d’expat ». Passer de la sécurité à l’extrême vulnérabilité est assurément l’une des réalités les plus difficiles à affronter. La solitude est inéluctable. Les montagnes russes.

 Dans mon cas, la situation était d’autant plus compliquée que la rupture est survenue entre deux expatriations. Je n’avais donc plus de lieu de résidence. Devenir « SDF » à 47 ans du jour au lendemain à 10 000 km de chez soi est assez traumatisant. Lurgence était donc de trouver un toit et là, le réseau d’amis prend toute son importance puisque j’ai été hébergée chez les uns et les autres pendant 3 mois. Un soutien psychologique, quel qu’il soit, est absolument nécessaire. On ne dort plus, on ne s’alimente plus, le corps lâche prise et notre capacité de réflexion est réduite à néant. La descente est rapide et l’issue peut vite devenir tragique.

 Viennent s’ajouter les sentiments de culpabilité et la perte de confiance en soi ; malheureusement, ces deux points sont, en général, fortement entretenus par le conjoint « lâcheur » et la sensation d’être la source de l’échec devient omniprésente. Dans le même temps, il faut palier les besoins matériels. Retrouver un emploi après 10 ans d’inactivité professionnelle, cela devient très compliqué : comment est-il possible de mettre en avant ses talents et prétendre qu’on est la meilleure pour le job alors qu’on est persuadée du contraire ?

 Viennent ensuite les considérations purement juridiques : trouver un avocat. C’est l’une des étapes les plus difficiles, mais c’est aussi celle qui m’a permis de franchir le premier pas vers la reconstruction. Puisque je subis cette rupture que je n’ai pas choisie, il m’a semblé indispensable de prendre la main sur mon divorce et ainsi de m’assurer que la procédure se passe dans les meilleures conditions pour moi. Il y a des hauts et beaucoup de bas, mais la page se tourne et j’entame le long chemin de la reconstruction. Ma vie m’appartient à nouveau et tout redevient possible.

Quelques conseils

Tous les couples évoluent, cependant en expatriation, cette évolution peut prendre un caractère perfide. Monsieur « bétonne » sa carrière et devient le « diamant » du couple. Madame assure tout le reste, elle constitue les « fondations » du couple, rôle primordial, mais… cela ne se voit pas. Elle devient donc la ’’femme de” et peut facilement se retrouver reléguée au rôle de potiche. C’est injuste mais bien réel.

 Gardez votre identité et votre indépendance, entre autre financière, à tout prix. Dans la mesure du possible, conservez le mode de fonctionnement « matériel » que vous aviez avant le départ. C’est l’une des clés de la réussite pour garder son estime de soi.

 Si malgré tout, la rupture pointe le bout de son nez, il est fort probable qu’elle se serait présentée de la même façon dans votre pays d’origine. Vous vous éviterez simplement l’étape « tout est ma faute » et la reconstruction n’en sera que plus facile. Les divorces ne sont pas plus nombreux en expatriation qu’ailleurs (lire notre article sur l’enquête Expat Value), néanmoins, certaines destinations offrent plus de tentations que d’autres. Il vaut mieux être informée du risque potentiel. « Chasseuse d’expat » est un métier à part entière dans certains pays.

 Il n’y a pas de recette miracle, chacune réagit différemment en fonction de sa situation personnelle. Le support émotionnel est primordial tout au long de la procédure et probablement après. Vous êtes loin de votre famille et vos amis ont leurs limites. Il peut donc être nécessaire de faire appel à un professionnel de santé. Mais cela se révèle très couteux et parfois impossible selon votre pays d’accueil. 

 Inscrivez-vous à votre consulat si cela n’est pas déjà fait. C’est préférable, surtout si vous avez des enfants. Le consulat pourra vous conseiller un avocat. Mais il n’est pas certain que celui-ci soit vraiment compétent en droit international de la famille. Je vous conseillerais donc de vous rapprocher d’un avocat spécialisé en France qui saura vous aiguiller. Cette démarche est à faire en urgence afin de vous protéger, en particulier si votre conjoint n’est pas de nationalité française. Il est en droit d’entamer une procédure dans son pays d’origine et cela peut tourner au scenario catastrophe pour vous.

 Et côté pro…

Professionnellement, c’est un nouveau départ, tout est à refaire. Là encore, faites vous accompagner, reconstituer un réseau, avancez à votre rythme, mais avancez. Ne perdez pas de vue qu’une action imparfaite est préférable à une parfaite inaction. Abordez ce travail de recherche d’emploi comme une nouvelle opportunité. Ce n’est pas immédiat, mais petit à petit les choses se mettent en place. Ne baissez pas les bras, quelle que soit la violence de votre séparation, osez tourner la page et reconstruisez VOTRE vie en fonction de VOS envies.

 Constituer un groupe pour partager son expérience

Constituer un groupe d’échange, de soutien, de partage pour les femmes dans notre cas serait bien utile. Il est indispensable de ne pas se sentir isolée. L’expérience des unes pourrait profiter aux autres, un peu comme cela se pratique dans une « pépinière d’entreprises ». Le but étant de donner des conseils et des solutions pratiques et de créer une dynamique de groupe afin que chacune puisse faire son deuil et sortir du tunnel au plus vite.

Y penser dans les contrats d’expat ?

Peut-être qu’il serait souhaitable que les divorces soient une clause des contrats d’expatriation. En effet, l’on demande au conjoint de renoncer à tout ou presque pour suivre son expat de mari (dans la plupart des cas). Tout est prévu pour le retour à deux : déménagement international, stage« d’impatriation », aide au retour… Pour le retour seule… Plus rien. Aucune aide n’est prévue. Vous n’avez plus de revenu, de mutuelle, de logement, de visa dans le pays d’accueil, plus de travail et ne pouvez espérer aucune aide sociale, puisque vous avez aussi quitté le régime français. Toutes n’ont pas la chance d’avoir une famille au retour et vous vous retrouvez sans appartement et sans travail. Tout est donc à faire. Peut être faudrait-il créer un type d’assurance « divorce », ou assurer une aide au retour en cas de séparation ? Les procédures de divorce sont longues : entre le moment où vous déposez votre demande et le moment où le tribunal rend un jugement de secours d’aide, rien n’oblige Monsieur à vous verser le moindre centime. C’est en priorité sur cette période qu’il faudrait travailler.

 Des regrets ?

Aujourd’hui, je vis toujours à Singapour car c’est un pays que j’aime par-dessus tout, néanmoins, je n’exclus pas la nécessité de rentrer en France pour reconstruire ma vie personnelle, professionnelle et regagner mon indépendance. Je repartirais sans aucune hésitation, je procéderais simplement d’une autre façon.

 Par Béatrice Drobe

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