Hibernatus, le revenant d’expat

Hibernatus, le revenant d’expat– Vous avez croisé à la boulangerie un type bizarre. Mmmm, ça nous dit quelque chose.

– C’est marrant, il attire l’attention mais rien à dire sur son apparence extérieure. Il est plutôt propre sur lui.

– Oui, c’est bien ça.

– C’est son comportement qui est étrange. A la boulangerie, il y a failli avoir un attroupement !

– Que s’est-il passé ?

La boulangère lui a annoncé le prix de la baguette et il a eu l’air très surpris. Il a fouillé dans son portefeuille et regardé les pièces avec un air perplexe. Comme s’il faisait dans sa tête un calcul compliqué. Puis il m’ a montré une pièce avec l’air complètement paumé en me demandant si c’est bien une pièce de 20 centimes. Pourtant je suis formelle, ce type n’est pas fou. Et il a l’accent d’ici. Étrange non ? Et là il m’a expliqué d’un air entendu, comme si moi seule pouvais le comprendre « Quand je suis parti, c’était encore des francs. Avec les euros, je suis un peu paumé ».  Non mais le franc, c’était en 2001 !

Et bien oui,  c’est clair, ce gars est un hibernatus, il revient d’expat.

Pendant 20 ans, on l’a envoyé à l’autre bout du monde. Je ne sais pas trop ce qu’il y a fait. Mais, loin de ses repères, il ne s’est pas vu vieillir et n’a pas vu son pays changer.

Du coup, maintenant, à son retour, c’est un alien. Un alien qui se ferait passer pour quelqu’un de chez nous, mais qui se trahit parfois. Chez le médecin, il demande comment on fait pour se procurer une carte Vitale et repart avec d’antiques feuilles de soin. Ses enfants ne sont même pas rattachés à la sécu. Il ne connaît pas son propre numéro de téléphone. Il demande ce qu’est que le Francilien. Et il prend un air perplexe en entendant parler du Navigo. Il n’a probablement jamais chevauché un Vlib, ni entendu parler de Blablacar. Et pourtant, il fait plutôt jeune pour son âge et il a l’air connecté!

Au supermarché, il mesure la taille du rayon bio avec étonnement, et cherche des Figolu, des Raider et du Tang. A la caisse, c’est l’attroupement. Evidemment, il n’a pas la carte du magasin, ni de paiement sans contact. Mais en plus, il propose de signer son ticket de caisse. Puis il regarde son caddie comme s’il allait se remplir tout seul. Mais, d’où sort-il ?

Dans la rue, il n’en revient pas que les voitures s’arrêtent au passage à niveau. La ville lui semble propre ; notre ville à nous, avec ses ordures partout et ses crottes de chien. D’après lui, il y a peu d’embouteillages et quand le train a 10 minutes de retard, il dit qu’il est à l’heure. En plus il sourit à tout le monde dans la rue, c’est gênant. Et il a l’air blessé que les gens ne lui répondent pas. C’est un vrai wirdos !

Le plus drôle, c’est quand il croise des gens qui lui sont familiers.

Il les dévisage longuement, et semble décontenancé. « Dis-moi, tu ressembles beaucoup à Pierre P, tu ne serais pas son grand frère, ou son oncle par hasard ? ». Et là, la personne répond, un chouille vexée, « mais je suis Pierre P. ». « Mais pourtant Pierre P. était un de mes amis de classe, tu me sembles plus vieux ». Non mais il s’est vu lui avec ses cheveux poivre et sel ? Alors, il se présente. C’est effectivement une vieille connaissance de Pierre. Il semble enchanté, traite Pierre comme un super ami, et lui propose de venir dîner chez lui. Alors qu’ils ne se sont pas vus depuis vingt ans et qu’ils n’ont jamais été très proches. Le pauvre Pierre ne sait pas comment se sortir de ce traquenard.

Le seul endroit où il ne semble pas trop paumé, c’est à l’école.

Ses enfants sont révoltés, déprimés, estomaqués par cette école sans compliments, où il est interdit de se lever en cours ou de sortir pendant les intercours. Lui, il lance un regard tendre vers les couloirs interminables, les parquets tachés, le tableau noir et les bureaux en bois. Il contemple, ravi, la liste des interdictions au mur et les déclinaisons latines et s’exclame enfin soulagé « Ici, rien n’a changé, c’est comme avant mon départ ! ».

Qu’il est étrange cet Hibernatus.

Il paraît qu’il revient d’Asie. Enfin, je n’en suis pas sûre. Car l’autre jour, il a rencontré d’autres aliens. Mais eux, ils revenaient d’Amérique. Et bien, il a eu l’air beaucoup plus proche d’eux que de nous qui n’avons jamais bougé d’ici, de son soi-disant village d’origine. Ils parlaient de villes complètement différentes, et se comprenaient à merveille. Il n’avait plus la lueur de doute qu’il a si souvent dans l’œil.

C’est une tribu étrange, tout de même, ces Hibernatus revenant d’expat !

Alix Carnot

 

Alix Carnot - Expat CommunicationAuteur de « Chéri-e, on s’expatrie ! », Alix est aussi la directrice du pôle carrières internationales d’Expat Communication, l’éditeur de FemmExpat.

 

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