Récit d’une arrivée à São Paulo

saopaulo_BresilArrivée à Guarulhos, taxi, appartement temporaire, lycée français, déménagement, solitude, formalités

Elle a posé un pied à terre. La voici au Brésil à São Paulo. Guarulhos l’accueille. Dans ses couloirs, une odeur de graisse brûlée. Non, c’est le parfum des pães de queijo. Elle saura la reconnaitre la prochaine fois. Douanes, bagages. Tiens, un duty free à l’arrivée. Dehors, une chaleur moite à relent de terre. Des arbres hauts et vert foncé. Tout le monde s’engouffre dans le taxi, direction São Paulo, leur nouvelle vie. Une mutation à laquelle la famille ne s’attendait pas. Il lui avait parlé du Brésil, elle avait rêvé Rio. Peu importe. Les clichés sont quand même présents à l’esprit : soleil, palmiers, samba, caipiriinha, peau dorée, bikini en triangle sur un fessier musclé. La famille en France, les amis les envient.

Pour le moment, c’est l’excitation de la découverte et un sentiment de peur. Insécurité. Favelas. Elle l’a lu dans toutes les infos glanées sur le net.Le taxi longe le fleuve, vire et entre dans la ville. Son regard filtre et ne voit que les deux belles bâtisses du Musée d’Art Sacré et plus loin de la Pinacoteca. Traversée du centre-ville. Noir et sale. Des tags. Des silhouettes errantes…
Euh, c est cela São Paulo ? Non, ce n’en est qu’une partie et elle apprendra à l’aimer. Bientôt elle ne jurera plus que par le Street Art de Vila Madalena. Elle reviendra aussi ici, sac en bandoulière, déambuler dans la 25 de março et à Santa Ifigenia. Le taxi roule. Une pyramide et un grand parc. Louise dit : « Vous avez vu ? Dans toutes les grandes villes, il y a une pyramide. » Quelle perspicacité, cette enfant ! Ils découvrent une longue statue d’hommes enchevêtrés : Botero ? Art naïf ? Stalinien ?

Lundi matin…Traversée de rues écrasées de vert et de béton, et voilà l’arrivée au flat hôtel. Tout le monde descend : le mari, les enfants et elle. Pour le moment, ils sont sonnés par ce qu’ils viennent de vivre : la fatigue leur tombe dessus. Les images photoshopées les mois précédents disparaissent sous les vraies emmagasinées cette dernière heure. Elle a défait les valises. Il a branché le PC. Le week-end se déroule en visite du quartier, restos et cafés. Ils ont déjà testés 5 jus de fruit frais. Un délice. _ Lundi, elle prendra les choses en main. Son nouveau boulot : femme d’expat, comme plus d’un million de Françaises à travers le monde.

Les enfants sont inscrits au Lycée Pasteur. Ce matin, elle les y emmène. Impossible de trouver le bâtiment, le petit Paul aperçoit des tags sur les murs : « C’est marrant, ils ont dessiné Paris !. » Stop ! Le taxi pile. C’est là. Avant d’entrer, elle recalcule pour la vingtième fois : si Paul et Louise passent avec succès leur test de saut de classe : il entrera donc en CM1 et Louise en 4ème. C’est compliqué. Mais c’est important, en acceptant le poste, ils se sont engagés à ne pas perturber leur scolarité. Elle les a fait travailler plusieurs mois en vue de cet examen, leur a expliqué maintes et maintes fois « sinon, vous passerez le bac à 19 ans, voire 20 ans car toi, Louise, tu es née en mars. » Les pauvres, ils sont à présent terrorisés à l’idée d’échouer. » Les tests commencent. Elle sort s’oxygéner. On lui a conseillé Nounours, « le café d’en face ». Elle se sent isolée, pâle et maladroite face aux autres, sourit timidement et espère qu’on vienne lui parler. Le café avalé, elle ne se démoralise pas, dans quelque temps, elle aussi aura de l’assurance et des copines à saluer. Tests finis et passés avec brio. Ouf. Un pas de fait. Ramassage scolaire mis en place. Le soir, elle raconte sa journée. Il lui dit : « Tu as lié des amitiés ? » Ironique, elle répond : « Bien sûr, je suis allée me présenter à toutes ces femmes et leur ai dit ‘veux-tu être mon amie ? » Il rigole. Elle se tait.

La recherche du logement est plus ardue, mais le matin, elle déborde d’énergie et d’espoir. Et puis, une agence de relocation est là pour l’aider. « Tu vois, dit son mari, l’entreprise a bien fait les choses. » Elle saura plus tard, d’après de nombreux échos, que ce n’est pas forcément une aide en soi, mais le barrage de la langue est là. Langue latine certes mais pour le moment, son esprit n’arrive pas à reconnaitre les similarités. Heureusement, il y a deux autres familles comme eux dans le flat. Les côtoyant, elle relativise ses difficultés. L’autre femme est enceinte et a un petit accolé tel un sotch à ses jambes. Elle, non. C’est un poids en moins.

Le mari, lui, a déjà son cadre de vie organisé : un nouveau job cependant avec un bureau et des collègues. Il rentre stressé le soir mais avec plein de choses à conter. _ Les enfants aussi. Elle n’ose pas au début leur dire qu’elle aussi, elle en bave. Elle doit tout recréer et rassurer leurs incertitudes. Elle, qui la rassure ? Sur Facebook, elle ne narre que des points positifs. Aux amies les plus proches laissées en France, elle se confie. »Condo », « Sécurité privée », « IPTU »La période la plus dure commence vers 17h, les enfants sont de retour, ils se chamaillent dans l’exigüité de l’appartement, elle les envoie à la piscine. C’est le moment de faire le point : aucun logement adéquat. Le budget prévu n’a pas pris en compte les délires des proprios. Elle décide de passer à la vitesse supérieure : annonces internet, contacts direct avec les agences en baragouinant en anglais et en faisant appel à ses souvenirs d’espagnol du lycée. Au bout de trois semaines, elle fondra en larmes un soir, et ils se disputeront. Ces dernières soirées à se regarder, les yeux dans les yeux, en espérant que demain apportera un coup de cœur, elle n’en peut plus. Il ne comprend pas et lui propose de l’emmener dîner dehors pour lui changer les idées. A côté de la plaque ! Puis, finalement après en avoir parlé au boulot, il réalise que oui, c’est dur et beaucoup plus que pour lui.
Enfin, l’appart est trouvé. Il a fallu faire des concessions. Le contrat est signé. Les termes : « Condo » voire « sécurité privée » ou « IPTU » ne sont plus des termes menaçants. La location des meubles est faite. Un mois et demi s’est écoulé. Conclusion : pas de chambre d’amis, mais de suite, on lui avait clamé que quatre chambres égales, c’était mission impossible… pas grave : ils peuvent déjeuner en extérieur, les enfants font du roller en sécurité et ils ont des amis dans le quartier.

Trouver son rythme
Grâce à São Paulo Accueil, elle n’est plus du tout seule. Elle va aux cafés d’accueil, élargit son groupe de nouvelles arrivées. Elles déjeunent ensemble. Le bout du tunnel s’éclaircit. Il ne manque que le visa, et donc le déménagement. Ils semblent impossibles à obtenir. Il manque un document, aïe, ils font grève, aïe, la signature n’était dans le bon cadre etc. Tous les jours, il entend « demain », tous les jours, il y a un nouveau hic. Pas de visa, pas de compte bancaire, pas d’achat internet, pas de signature reconnue au cartorio… Bref, il faudra plusieurs mois pour avoir visa, RNE, CPF… Une autre galère mais elle garde son calme, sa mission, à elle, est remplie.

Actuellement, elle fait « planton » dans sa nouvelle demeure. Viendra ou viendra pas ? Les ouvriers des derniers ajustements jouent à cache-cache… cache-patience… Zen… Tout sera fait au rythme brésilien. Tout se débloquera. L’emménagement aura bien lieu. Le mari ne sera pas là. Juste quelques heures « parce que, tu comprends, j’ai cette réunion si importante »… Il promet qu’il se rattrapera quand ils repartiront. Ne le croyez pas, il sera en passation de pouvoir avec son remplaçant.

Aujourd’hui. Chacun a retrouvé un rythme. Ils vont peut être même inscrire toute la famille dans un club. Mission réussie. Elle peut souffler. Sa nouvelle vie paulista va enfin commencer : alors, tudo bom ?

Anne Lebas-Signora Pour Lepetitjournal.com/brésil

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