Enfants à besoins éducatifs particuliers : quelle prise en charge dans les établissements français à l’étranger ?

élèves à besoins éducatifs particuliers

Les choses bougent dans le réseau des écoles françaises à l’étranger dans le domaine de l’inclusion et nous ne pouvons que nous en réjouir. Partir en expatriation avec un enfant DYS, autiste, ou encore avec un handicap moteur est de moins en moins un problème. Comment la prise en charge des enfants à besoins éducatifs particuliers est-elle organisée dans le réseau des écoles françaises à l’étranger ? Nous avons posé nos questions à Corinne Truffier, fondatrice des ateliers Vie ma Vie de Dys et référente EBEP (Enfants à besoins éducatifs particuliers) de la FAPEE (Fédération des associations de parents d’élèves des établissements d’enseignement français à l’étranger) et porte-parole des parents auprès de l’AEFE et de la MLF.

Tout d’abord qu’est-ce qu’un besoin éducatif particulier ?

C’est le fait d’avoir une difficulté scolaire spécifique qui nécessite un aménagement temporaire ou sur le long terme. Il s’agit de contraintes ou d’obstacles que ne rencontre pas la majorité des élèves. Cela ne concerne pas seulement des enfants en situation de handicap, mais aussi des enfants en difficulté scolaire, qui ont des troubles spécifiques des apprentissages ou encore allophone.

C’est la circulaire du 13 août 2021 qui précise les modalités de prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers. Tous les élèves du réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger homologués, qu’ils soient de nationalité française ou autres, bénéficient des dispositions relatives à l’inclusion scolaire (loi handicap du 11 février 2005), en prenant en compte les ressources et contextes locaux, d’autant que les établissements d’enseignement français à l’étranger ne disposent pas de structures spécialisées telles qu’elles existent sur le territoire français.

Cela veut dire qu’en théorie, on accueille tous les enfants, mais il y a à l’étranger des nuances, et la possibilité aussi de rencontrer des difficultés d’accueil ou des poursuites de scolarité si tous les aménagements qu’on a mis en place de fonctionnent pas. Il faut savoir que le système de prise en charge en France n’est pas totalement transposable à l’étranger : les parcours Ulis ou classes Segpa n’existent pas à l’étranger. Les bacs techno ou pro sont également rares alors qu’il peut s’agir d’une orientation souhaitable pour certains élèves après la 3e. En pratique donc, ce n’est pas la même prise en charge.

Cependant, il y a un cadre et une volonté de développer des parcours d’inclusion de ces élèves et de les accompagner le plus longtemps et dans les meilleures conditions possibles.

NDLR : n’hésitez pas à réécouter le webinaire consacré à l’inclusion dans les établissements français de l’étranger diffusé dans le cadre des Rendez-vous ReflexeS le 16 mars dernier

J’ai un projet d’expatriation et j’ai un enfant déjà pris en charge en France pour des besoins éducatifs particuliers, quelle est la première démarche à faire avant mon arrivée ?

La première chose à faire est de contacter l’établissement dans lequel vous souhaitez inscrire votre enfant. Mon conseil est de sécuriser le parcours scolaire en amont et faire le point en toute clarté sur les possibilités d’accompagnement de l’enfant avec le chef d’établissement.

La deuxième chose à faire est de se rapprocher des parents, des associations de parents de l’école ou locales. Ce sont eux qui vont vous parler au mieux des implications au quotidien pour votre enfant dans ce nouveau pays. La prise en charge médicale et/ou paramédicale par exemple : la présence de spécialistes en langue française ou non, etc. Enfin ayez en tête que si tout n’est pas pris en charge en France par la sécurité sociale, il peut y avoir des conséquences, aussi à l’étranger du point de vue financier. Renseignez-vous à l’avance.

Mon enfant est scolarisé dans un établissement français à l’étranger, et on me demande de faire un bilan : vers qui me tourner ?

Un professeur, une infirmière scolaire, un médecin scolaire,… constatent que l’enfant éprouve certaines difficultés et peuvent alors demander aux parents de faire un bilan. Cela peut être un orthophoniste, un neuropsychiatre, un psychomotricien, … C’est donc à la famille de se charger de trouver ce(s) spécialiste(s) pour demander un bilan.

A l’étranger, ce n’est effectivement pas toujours facile. Il faut savoir que certaines rééducations peuvent se faire dans une langue étrangère, si l’enfant la maîtrise suffisamment. Je pense à la rééducation en psychomotricité, par exemple. Pour d’autres troubles, ceux du langage, ou pour des tests ou des bilans, il est essentiel de les faire dans la langue « maternelle » de l’enfant.

De nombreuses associations de parents d’élèves pourront vous orienter vers des spécialistes déjà connus d’autres parents ou vous accompagner dans la procédure à suivre pour faire des bilans. La FAPEE a d’ailleurs publié un guide pratique que vous pouvez consulter via ce lien et qui est personnalisable dans chaque établissement.

Est-il toujours nécessaire de faire ces bilans ?

Tout d’abord il faut dire que les enseignants cherchent toujours, en première intention, à aider l’élève. Ces dernières années, mais aussi faute de formation dans ce domaine, ils ont eu tendance à très rapidement demander des bilans et des tests. Je le vois au quotidien dans mon travail aujourd’hui au sein de mon entreprise Les ateliers « Vie Ma Vie de DYS ».  Cependant, si les difficultés scolaires persistent, bien sûr il faut faire des bilans. Ces derniers vous aideront à comprendre les difficultés de votre enfant et à mieux l’accompagner.

Les troubles peuvent effrayer, et souvent les parents sont dans le déni. C’est parfois très fort à l’étranger, où l’on a peur du regard des autres au sein d’une communauté plus fermée. Mais c’est vrai en France également. Idéalement, il faudrait que tous les parents des enfants de maternelle ou en primaire aient au moins une fois une sensibilisation aux troubles DYS pour réaliser que les troubles des apprentissages n’empêchent pas de réussir sa scolarité.

Diagnostiquer rapidement des troubles des apprentissages, c’est assurer un meilleur accompagnement de l’élève au quotidien.

En voyageant, nous expats, nous avons l’impression que ces questions de special needs sont très connus et acceptés dans la culture anglo-saxonne par exemple, contrairement à la France. Qu’en pensez-vous ?

C’est tout à fait vrai, aux USA le regard sur l’enfant « atypique » est différent. On touche presque à quelque chose de culturel. L’école en France, traditionnellement, c’est l’école de la réussite « normée », avec des voies linéaires toutes tracées. Le « out of the box » ne fait pas vraiment partie de notre tradition académique. Mais les choses sont en train de changer. Si l’inclusion était déjà présente dans les discours, elle commence à rentrer petit à petit dans des actions concrètes.

Comment faire justement, pour que l’inclusion ne soit pas qu’un discours ?

Il y a la formation des personnels bien sûr, et les choses vont aller en s’accélérant dans ce domaine, avec des diplômes spécifiques pour les enseignants à l’étranger.

Soyons clairs, aujourd’hui sur le terrain, l’inclusion des élèves aux besoins éducatifs particuliers, est beaucoup portée par les actions de parents d’élèves. Et tant mieux ! C’est pour cela que je dis souvent lors de mes déplacements sur le terrain :

« rencontrez-vous entre parents, organisez des groupes de parole, formez des associations – et si vous avez de l’expérience en la matière : partagez-là et faites-en profiter les autres ! ».

A la clé, il y a l’échange de ressources bien sûr. Mais il faut savoir qu’en groupe, on est plus fort pour faire avancer les choses au sein de l’établissement.

L’inclusion, c’est la communauté dans son ensemble. Je parle souvent de politique globale. C’est aux chefs d’établissement de porter ces sujets. De les ouvrir à tous, et pas uniquement aux parents d’enfants concernés. Sensibiliser tous les parents a beaucoup d’effets positifs, mais il est vrai que c’est encore un peu compliqué.

Revenons aux actions concrètes. Mon enfant a des besoins d’éducations particuliers : quels sont les aménagements possibles à l’étranger ?

Une fois les bilans établis, votre enfant sera pris en charge par l’école avec des aides et aménagements selon les dispositifs en vigueur dans l’éducation nationale française. Les plans d’accompagnement à la scolarisation (PAI, PPRE, PAP, PPS) que vous connaissiez peut-être déjà en France sont également suivis par les établissements scolaires français à l’étranger. Vous trouverez tous ces documents sur le site de l’AEFE.

A quel moment la reconnaissance « officielle » d’un handicap est-elle nécessaire ?

La reconnaissance de handicap n’est pas une obligation, mais elle est nécessaire car depuis peu, une prise en charge financière des AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) est possible sous conditions (voir plus bas).

En ce qui concerne la procédure de reconnaissance du handicap, il fait faire une demande auprès d’une Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) ; pour les Français établis hors de France, la MDPH compétente pour instruire leur demande est celle par l’intermédiaire de laquelle un droit ou une prestation leur a été antérieurement attribué. Pour une première demande, les Français établis hors de France peuvent s’adresser à la Maison Départementale des Personnes Handicapées de leur choix (une liste est disponible ici).

A noter qu’il faudra alors faire établir les bilans médicaux, paramédicaux nécessaires à la bonne évaluation des besoins de votre enfant. Ces documents doivent être rédigés en français ou faire l’objet d’une traduction assermentée. La signature d’un médecin référent du Consulat est alors nécessaire. La commission statue alors sur les aménagements à effectuer : AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap), matériel spécifique, équipements, ordinateurs, etc.

Qui prend en charge financièrement ces aménagements ?

L’établissement n’a aucune obligation de prendre en charge les aménagements autres que ce soit un AESH, un ordinateur ou du matériel spécifique . C’est en fait, du cas par cas, selon les situations et les établissements. Il y a autant de scénarios différents que d’écoles à l’étranger !

Et qu’en est-il des précisément des AESH à l’étranger ?

Dans un établissement français à l’étranger, c’est la famille qui emploie l’accompagnant pour son enfant.

Peut bénéficier du financement d’un AESH, tout élève français (ou binational) qui réside à l’étranger et qui est scolarisé dans un établissement d’enseignement français homologué ou en niveau dérogatoire. Depuis septembre 2021, le financement d’un AESH n’est plus lié à l’obtention d’une bourse et n’est donc plus soumis à aucune condition de ressources.

Il faut savoir que même si c’est au parent de recruter cet AESH, une convention tripartite (famille/AESH/lycée) doit être impérativement établie et signée. N’oubliez pas qu’un AESH intervient dans la classe sous l’autorité de l’enseignant.

Merci à Corinne Truffier que vous pouvez contacter via le site Vie Ma Vie de Dys.

Liens utiles :

Dossier école inclusive sur le site de la Fapee

Le Guide des AESH dans l’EFE édité par la Fapee

Le livret d’accompagnement AESH à la MLF

Les actions mises en place par l’AEFE en matière d’inclusion scolaire

Les actions mises en place par la MLF en matière d’inclusion scolaire

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