Situations anxiogènes et gestion du stress chez l’enfant : l’avis du pédiatre

Enfant-expat-stress-pediatre-UNE femmexpat 559x520L’enfant ne sait pas exprimer ses angoisses, mais elles vont retentir sur son corps ou son comportement. Comment détecter les situations de stress ? Comment se manifestent-t-elles ? Et que peut-on mettre en place pour rassurer nos petits expats ? D’autant plus, en ces temps troublés par la crise sanitaire actuelle.

Retrouvez les conseils de  Pauline Krug-Tricot, pédiatre française expatriée à Tokyo et fondatrice du podcast WeePeeS (pour « Wonder Pédiatres » !) qui traite de pédiatrie et de parentalité !

 

Les situations particulières liées à l’expatriation… et au COVID-19

L’expatriation est source de changements et donc d’anxiété, et parfois dès le plus jeune âge, alors qu’on pensait justement « il est petit, il s’adaptera sans problème ! ». Mais l’enfant, si petit soit-il, perd ses repères, le lien avec des grands-parents, ses amis, sa nounou, son quotidien rythmé par la crèche ou l’école, ses habitudes alimentaires. Il découvre un nouvel environnement, s’imprègne de bruits, d’odeurs, de températures inhabituels… Il ressent le stress chez ses parents, et parfois leur culpabilité de lui imposer ce changement.

Et au milieu de l’expatriation, le coronavirus est venu encore chambouler notre équilibre précaire.

Les enfants ont été accusés au début de l’épidémie d’être les plus grands vecteurs de contagion, on les a considérés à tort comme des bombes à retardement prêtes à contaminer sans le savoir leurs grands-parents fragiles et tous leurs copains d’école, ils ont entendu et compris la crainte qu’ils suscitaient.

Ils ont ensuite perdu tous leurs repères : plus d’écoles, des parents à la maison, et pour beaucoup l’impossibilité de rentrer dans leur pays d’origine et de voir leurs familles. La situation a été particulièrement anxiogène pour les parents, les informations ont tourné en boucle, et les enfants ont bien sûr été imprégnés au plus profond de toutes les angoisses et incertitudes de leurs aînés, avec en plus une grande difficulté d’interprétation et de prise de recul.

 

Comment prévenir cette angoisse liée à l’expatriation, comment faire pour que tout se passe au mieux ?

Je pense déjà qu’il ne faut pas minimiser le fait que ce sera difficile.

Certes, on est persuadé en tant que parent d’offrir une opportunité magnifique à nos enfants en partant à l’étranger. Mais nos craintes et tristesses à nous – s’éloigner de la famille et des amis, renoncer à son quotidien confortable ou en tout cas à une routine bien rodée en France, changer de travail, apprendre une nouvelle langue- se retrouvent chez nos enfants.

N’hésitez pas à verbaliser vos craintes, à anticiper ce que lui peut ressentir sans arriver à vous le dire : « tu sais, je suis partagée moi aussi. A la fois contente et inquiète. C’est super de partir à l’aventure, c’est une chance inouïe… Mais je suis triste de quitter mes parents, mon travail, j’ai un peu peur. Mais je pense que ça vaut le coup ».

Ainsi, votre enfant va pouvoir s’autoriser à avoir peur et à vous le dire. Mais il faut trouver la juste mesure et ne pas non plus en faire un confident.

Montrez combien vous êtes fière de lui, encouragez-le, faites-lui confiance !

Ne le surchargez pas en activités extra-scolaires, mais laissez-lui l’opportunité de s’ennuyer et ainsi de laisser libre court à sa créativité.

Il est toujours important de favoriser une bonne hygiène de vie : se coucher à heures fixes y compris le week-end, proposer des heures de sommeil bien adaptées à son âge, offrir des repas équilibrés et riches en fruits et légumes, lui proposer un sport qu’il aime, limiter les écrans surtout après le dîner.

Il faut aussi recréer rapidement une routine, que cette nouvelle maison ne soit pas juste « la maison de l’expatriation », mais y retrouver un quotidien :  partager des repas en famille, lire une histoire le soir, regarder un film ensemble le week-end… autant de petits rituels qui créent une atmosphère rassurante.

Concernant l’épidémie de coronavirus ou toute autre situation anxiogène liée ou non à l’expatriation (nouveau bébé dans la famille, maladie, décès, divorce…) :

Il faut en parler à votre enfant, même aux bébés avec un langage adapté, mais ne pas le submerger d’information non plus. Eviter la télévision qui tourne en boucle, anticiper certaines questions mais ne pas non plus ouvrir le débat sur le sujet en permanence si ce n’est pas lui qui le demande.

Une information juste, éclairée, adaptée à son niveau de compréhension !

 

Quels signes doivent nous alerter ?

Il faut être attentif en tant que parents, enseignants et professionnels de santé, à certaines situations qui peuvent évoquer une anxiété majeure chez l’enfant, notamment quand ces signes sont nouveaux et s’installent dans le temps.

Notamment, sur les plans :

  • du sommeil : refus de se coucher, difficultés à l’endormissement, cauchemars plus fréquents, réveils nocturnes avec impossibilité de se rendormir seul
  • de l’alimentation : refus alimentaire, tri sélectif, ou au contraire pulsions alimentaires avec prise de poids conséquente
  • digestif et urinaire : douleurs abdominales, nausées, constipation, encoprésie (fuite de selles dans la culotte), énurésie secondaire (un enfant qui se remet à faire pipi au lit alors qu’il était propre depuis plus de 6 mois), troubles mictionnels variés (un enfant qui fait pipi toutes les 10 minutes, qui présente des fuites en journée)
  • aggravation des signes ou augmentation des poussées chez les enfants porteurs d’une pathologie chronique – type eczéma ou asthme
  • comportement : agitation ou au contraire enfant « trop calme », isolement et retrait social, régression, agressivité… Un enfant agressif qui tape, mord, crie, fait des colères… veut souvent exprimer quelque chose. Un enfant n’est pas « méchant », « capricieux », « tyrannique ». Il a juste des comportements inappropriés qui sont le témoin que « quelque chose ne va pas ». On peut aussi noter des tics (clignement des yeux, haussement des épaules, tics verbaux, raclement de gorge…), du bruxisme (grincement des dents, surtout la nuit), des compulsions (lavages de mains trop fréquents, enfant qui se ronge les ongles, tourne une mèche de cheveux…)
  • scolaire : difficultés de concentration, baisse des résultats scolaires, désinvestissement, voire phobie scolaire.

Il faut aussi être vigilants aux paroles d’auto-dévalorisation, aux ruminations anxieuses, et aux conduites à risque.

 

Et une fois qu’on a identifié une angoisse chez notre enfant, que faire ?

Ces signes sont rarement tous présents chez un enfant, et ne sont pas forcément inquiétants s’ils ne durent pas et ne l’handicapent pas dans son quotidien.

Il ne faut pas laisser les troubles traîner et s’installer, mais il faut aussi pouvoir laisser l’enfant trouver de la ressource en lui pour y remédier.

Bien sûr, vous pouvez en parler avec lui.

En cas de comportement difficile, essayez de rester calme, de ne pas le laisser pleurer, de ne pas le punir… Rappelez-vous que ces comportements inadaptés ne sont pas utilisés dans le but de vous nuire, mais ne sont que le reflet de son moral en berne.

Faites-vous aider par le réseau des expatriés qui sont souvent passés par les mêmes phases, on se sent moins seules ! Enfin, n’hésitez pas à faire appel à un professionnel : pédiatre (notamment en cas de plaintes somatiques), psychologue… Vous pouvez même trouver des psychologues en ligne sur des plateformes dédiées.

 

Pauline Krug-Tricot, pédiatre française expatriée à Tokyo

 

Réécouter ici son podcast consacré à la rentrée scolaire en période de Covid-19

 

> N’hésitez pas à contacter Pauline via sa page Facebooksur la page Instagram @WeePeeslepodcast, ou sur Twitter @WeepeesPodcast. 

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