Un Brexit en plein Covid : double peine pour les Français au Royaume-Uni

Brexit-2020-UNE femmexpat 559x520Brexit, Brexit, Brexit… Cela fait maintenant 4 ans que ce mot fait tous les jours la Une des journaux au Royaume-Uni.

Un sujet sensible et complexe que chacun a eu le loisir de disséquer, ausculter, soupeser, accepter, documenter, filmer, discuter dans tous les sens. A tel point que le sujet n’en est presque plus un lors des dîners qui n’ont d’ailleurs plus lieu pour cause de Covid. « Fed up ». Tels sont les deux mots qui reviennent juste après « Brexit ».

A quelques jours d’une fin des négociations (au 31 décembre), Camille Chevallier Jorcin, experte de notre Coach Academy d’Expat Communication, revient sur l’histoire de ce fameux Brexit et relève pour nous les humeurs et ressentis des expatriés français à Londres à la veille du  grand « cut » final.

 

Tout a commencé le lendemain du Référendum…

Je me rappelle ce vendredi 24 juin 2016, au lendemain du Référendum. Comme une gueule de bois, le réveil était difficile et le besoin d’en parler irrépressible. A tel point que même dans le métro londonien, les passagers ne pouvaient s’empêcher d’en parler aux personnes autour d’eux.

Ce n’est pas là une habitude britannique. On ne parle pas à des étrangers et encore moins de politique.

Je me suis moi-même retrouvée à en discuter avec un couple d’Allemand, deux Anglais et une jeune Espagnole. Nous étions tous très surpris car nous étions entourés de « Remainers ».

Londres avait du mal à digérer les résultats avec une majorité qui avait voté à 59,9 % pour rester dans l’Europe. Bien sûr, petit rappel politique et sociologique que l’on oublie trop facilement, Londres, ce n’est pas le Royaume-Uni. Et le Royaume-Uni avait bel et bien voté pour le Brexit à 51,9 %.

Le divorce allait donc avoir lieu !

 

Le pouvoir du déni

Après un « It’s unbelievable…”, nous avons été nombreux à passer au « It’s impossible » et rapidement au « This will never happen anyway ».

Et ce déni a duré longtemps pour plusieurs raisons parmi lesquelles :

 

C’est difficile de vivre un divorce et c’est bien de cela que l’on parle avec le Brexit : la fin d’une histoire d’amour, de paix et de marché commun.

Le Royaume-Uni veut quitter l’Europe, pouvoir être entièrement libre de ses partenaires commerciaux, fixer ses propres règles, se rapprocher de son American lover… et tout ça, sans régler la pension alimentaire.

Personne ne veut faire de compromis et comme dans tout divorce, il y a beaucoup d’émotions : colère, ressentiment, agacements.

C’est plus facile de ne pas y croire que d’essayer de gérer ce que l’on ressent.

 

Les relations entre le Royaume-Uni et l’Europe ont toujours été assez houleuses

C’est le moindre que l’on puisse dire. Combien de fois ai-je entendu : « Tu sais les Anglais ils ont toujours été un peu indépendants vis-à-vis de l’Union Européenne, c’est une île. Pas d’euro, pas dans l’espace Schengen. » ou encore « C’est un coup de pied dans la fourmilière, il y aura un second vote, non, franchement, ca ne se fera pas. »

 

Le déni a été alimenté par une multitude de rebondissements politiques

Changement de premiers ministres, nouvelles élections générales, reports à plusieurs reprises, impossibilité de trouver un accord avec à chaque fois l’espoir d’un nouveau referendum. « Ça va être revoté et ça ne passera pas » était le leitmotiv.

Sauf que ça n’a jamais été revoté et sauf que même s’il y avait aujourd’hui un autre vote, apparemment, ce serait certainement pro-Brexit.

Encore maintenant, à quelques semaines de l’échéance, on peut encore entendre des : « Non, mais attends, ça ne peut pas être un no-deal donc ça ne se fera pas. »

Jusqu’au 31 décembre, certains pensent encore ici que « tant que ce n’est pas fait, ça peut encore ne pas se faire ».

 

 

Le Brexit ou comment devenir étranger

Le Brexit semble avoir délié les langues parmi certains Britanniques contre les étrangers et les Européens. Tous dans le même sac (poubelle). Il est vrai que les journaux populistes se sont fait plaisir et la campagne pour les élections européennes a donné une tribune à des candidats connus pour leurs antécédents de racisme déclaré.

La Commission sur l’égalité et les droits de l’homme préconisait au Royaume-Uni – dans un rapport publié en août 2016 – de « prendre des mesures urgentes ».

Réactivation du fameux « French bashing » à Londres ? Légendes urbaines ou véritables histoires, chacun a dans sa poche une anecdote à raconter au lendemain du Referendum : « La personne était au téléphone et parlait français quand tout a coup, un Anglais lui a arraché des mains et l’a traitée de tous les noms sous prétexte qu’il était temps que les Français rentrent chez eux. »

L’atmosphère aurait changé à Londres. Je ne le ressens pas personnellement mais en revanche, perdre le statut d’Européen, c’est prendre le statut d’étranger. C’est s’éloigner encore un peu comme si la Manche s’élargissait de quelques kilomètres. Et c’est vrai que ça fait une boule dans l’estomac.  

 

La tristesse d’une page qui se tourne

L’Europe c’est aussi un idéal et cela touche en plein cœur. Nous, Français, avons été nourris à cet idéal de Schuman. Les Anglais n’ont pas connu tout à fait la même chose. Ils ont rejoint l’Europe plus tardivement en 1973.

L’histoire de l’Europe n’est pas apprise comme en France. « Pourvu que ce ne soit pas le début de la fin de l’Europe » s’inquiète la communauté française à Londres.

Et puis, le Brexit, c’est aussi voir émerger à nouveau les questions sensibles liées à l’Ecosse et à l’Irlande.

 

D’un point de vue plus pragmatique, beaucoup de Français voient déjà tous les inconvénients de cet au revoir imminent – notamment pour les :  

>  étudiants :

La fin d’Erasmus est un drame alors que les frais d’Université sont très élevés et que près de 30 000 étudiants européens viennent étudier chaque année au Royaume-Uni. « C’était une formidable opportunité pour un brassage des cultures et les nouvelles générations ».

> entrepreneurs :

La fiscalité britannique aidait fortement à l’entreprenariat. Beaucoup de Français, comme moi, n’ont pas hésité à ouvrir leurs bureaux ou lancer leur produit ici. Qu’en sera-t-il demain ? L’entreprenariat pour les Français sera-t-il toujours aussi facile ?

Je n’en sais rien et au vu de la complexité, je laisse les experts suivre les évolutions et m’en informer.

> salariés :

Si le Royaume-Uni met en place le système de sponsoring pour les entreprises, les salariés européens devront certainement devoir démontrer pourquoi les choisir « eux » et non un salarié britannique. Ils seront aussi beaucoup plus dépendants de l’entreprise qui les sponsorisent pour rester dans le pays.

> personnes nécessitant des soins :

Quelle sera la prise en charge des Français ici après le Brexit ?

 

Alors dans ce contexte, la vraie question c’est : rester ou partir ?

 

Le Frenchxit ou les Français qui rentrent

On a tous ici des amis qui rentrent. Et bien sûr ça s’accélère avec la crise Covid. Le principe de la quarantaine au retour et la difficulté de rentrer en France ferment les frontières. Ça devient très compliqué.

Et économiquement, beaucoup de Français ne pensent pas que le Brexit présage d’une embellie. Au contraire, c’est comme une double peine – au sens propre comme au sens figuré – pour les Français ici.

Alors certains s’organisent pour :

  • rentrer en France
  • partir ailleurs 
  • ne pas venir en UK et changer les projets

Malheureusement, comme il est très difficile de connaitre le chiffre exact des Français à Londres (on parle de 300 000) ou au Royaume-Uni, il est également très difficile aujourd’hui de savoir qui rentre. Les chiffres seront peut-être accessibles dans quelques mois.   

 

Ceux qui restent et se préparent

Dans l’autre camp, on retrouve les Français qui s’organisent pour rester.

L’organisation se fait sur le plan personnel et professionnel. Et ce n’est pas facile tant tout est flou.

No deal, bad deal, good deal ?

Personne ne sait encore aujourd’hui ce qui va ressortir de tout cela. « A quelle sauce allons-nous être mangés ? » est la question récurrente. Un statut spécifique « The Indefinite Leave in the United Kingdom, under Appendix EU to the Immigration Rules » permettrait de poursuivre plus ou moins comme avant.

Ce document est facilement accessible mais ne présente pas de garantie sur quoi que ce soit. La demande pour la « British Citizenship » semblerait être une de meilleures solutions pour anticiper et se prémunir des changements à venir.

Elle est assez contraignante à obtenir mais le jeu en vaut certainement la chandelle. A écouter les Français autour de moi, c’est la voie choisie par beaucoup qui souhaitent rester.

 

Le Brexit crée une grande instabilité et l’impatience est générale.

« Qu’on en finisse de cette saga ! ». L’attente a trop duré et l’ignorance de la situation à venir ajoute un poids à une situation internationale déjà préoccupante.

Difficile d’appliquer le fameux « don’t take it personnaly » anglais quand on entend de plus en plus que finalement, le cœur de la crise du Brexit serait pour les Anglais « leur relation d’amour et de haine avec la France ».

Quelle tristesse s’il est encore question de tout cela entre des voisins qui ont ce lien si particulier. Mais soit, s’il doit en être ainsi.

 

Il ne nous reste plus qu’à espérer que ce divorce se fasse entre gentlemen sans rompre les liens du cœur. J’espère de mon côté que le Royaume-Uni reviendra de mon vivant dans sa famille européenne, cette famille dont parlait si bien Winston Churchill lors de son discours à l’Université de Zurich en 1946 : “There is a remedy which would in a few years make all Europe free and happy. It is to re-create the European family, or as much of it as we can, and to provide it with a structure under which it can dwell in peace, in safety and in freedom.”

 

Camille Chevallier JorcinCamille Chevallier Jorcin, expatriée à Londres

Passionnée par l’interculturel, Camille est l’une de nos expertes de l’Expat Coach Academy d’Expat Communication. Coach professionnelle certifiée de l’Institut de Coaching International de Genève et membre de l’International Coach Federation, Camille a un parcours de plus de 20 ans dans la communication d’entreprise au sein de structures internationales. Elle est également praticienne certifiée MBTI et Programmation-Neuro-Linguistique.

 

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