Cela fait 4 mois que Marc et Valérie vivent avec ce projet. Ce départ au Mexique, en contrat d’expatriation qui tombait dans un timing parfait pour le couple et leurs 2 filles. 4 mois à y penser en se rasant le matin, en se couchant le soir, en mettant quelques copains dans la confidence. Mais le contrat, lui se faisait attendre. Le deal au Mexique ne s’est pas fait. Conséquence : le projet d’expatriation tombe à l’eau. Comment rebondir ? Que faire de ce vide qui se crée soudainement ? Nous avons demandé à Marie-Dominique Quignon, Expat Coach chez Expat Communication, de nous donner quelques pistes
Le projet d’expatriation : cette étape de transit
Si cette période de l’entre deux est souvent vécue dans le stress, elle n’en reste pas moins stimulante. Un peu comme une grossesse : on se projette dans une nouvelle vie. Chaque jour apporte sa nouvelle photographie de ce que pourrait être « l’après ». Et mois après mois, le conditionnel se fait futur, un peu malgré nous. C’est normal, et c’est ce qui fait la beauté du projet d’expatriation. Cependant on sent aussi que l’on vit comme un peu dissocié. Là-bas déjà, en pensée, et encore ici, physiquement. Cette période de travail sur le projet d’expatriation est un temps essentiel pour le processus de transition, une zone neutre, comme quand à l’aéroport on attend son vol. On va quelque part, mais on n’y est pas encore.
Cette période nous change déjà
Cependant, beaucoup de choses changent déjà dans cette période. Tout ce que l’on fait, on le fait en fonction de cette nouvelle vie qui s’ouvre à nous. Notre rapport aux autres change aussi. On se rapproche d’autres expats « qui ont fait l’Amérique du Sud », on se positionne aussi. Dans le couple, dans la famille. Les équilibres changent. L’humeur, le sommeil, l’alimentation. Il faut dire qu’il y a cette préparation pratico pratique, dont il faut, on le sait, s’occuper, alors même que les conditions matérielles du départ ne sont pas connues. Inscriptions des enfants à l’école, recherche d’un home sweet home pour mieux préparer cette nouvelle vie de famille aussi.
Et puis… un retour brutal à la réalité
Ah ce fameux contrat d’expat que l’on attend toujours si longtemps ! Il est vrai que beaucoup d’expats acceptent cette longue étape de transition en connaissance de cause. On sait que le contrat et le package sont souvent les derniers détails qui arrivent. Mais que faire quand il n’arrive pas ? Car cela arrive. Les raisons sont variées :
- On apprend que le rachat de la société locale par la holding ne se fera pas. Plus de deal, plus de contrat, plus d’expat.
- On fait le choix de ne pas accepter le contrat proposé. Par lucidité, responsabilité.
- Des facteurs internationaux qui nous dépassent en décident autrement : guerre, pandémie, etc.
Et c’est donc un retour à une autre réalité à laquelle il faut se préparer : on ne part plus. C’est le désenchantement : plus de perspective, comme un ballon qui se dégonfle, c’est un énorme sentiment de vide qui s’abat sur la famille. Le projet d’expatriation apparaît alors comme un mirage auquel on s’est accroché pendant des mois.
Comment sortir de ce mauvais pas ?
Ecouter ses émotions.
Accueillir la mauvaise nouvelle. Accueillir ses émotions, les nommer : frustration, déception, colère… Ecouter sa petite voix intérieure et les besoins qu’elle exprime : c’est un sacré coup, mais que dit mon moi intérieur ? De quoi ai-je besoin, là tout de suite ?
Lâcher prise et accepter de vivre dans le temps présent
Accepter qu’on n’a pas de prise sur cette nouvelle réalité. Réaliser que ce monde de 2020-2022 dans lequel on évolue, nous expats, est celui de l’incertitude. A l’image des expats revenus de Russie en février dernier après 5 mois d’installation, ou encore des expats jamais partis vers Singapour en 2021 à cause du Covid ou des familles qui ont attendu des mois qu’on puisse délivrer un visa à l’un des conjoints.
Analyser ce vide : que me dit-il ?
Alix Carnot, qui a connu enfant cette situation, explique :
« il y a ce vide, qui se crée soudain et qui laisse toute une famille dans un déséquilibre total. Mais la nature a horreur du vide. Et toute ma vie ensuite, je sais que j’ai travaillé à combler ce vide. Mon travail auprès des expatriés est sans aucun doute un résultat de cette expat tombée à l’eau quand j’étais enfant. Faites-vous confiance… la nature fera son travail ».
Pour certains, ce vide pourra être un soulagement. Ce soulagement laissera donc la place à une période de repos, de calme et de sérénité. Encore une fois, écouter cette petite voix permettra de vous connaître un peu plus. Vous n’attendrez peut-être pas le prochain contrat pour dire non à l’expatriation…
Revenir dans le concret : comment ?
Une fois le temps de l’acceptation passé, par où commencer ? Selon les tempéraments de chacun, les réactions seront différentes, l’important c’est de passer à l’action. S’inscrire dans du concret, se fixer des objectifs, même modestes, va nous aider à poser des jalons pour avancer.
Une solution peut être de prendre les ingrédients de ce projet d’expatriation déçu (ou déchu?) on prend tout ce qui en faisait le piment, qui nous excitait et nous apportait tellement de joie dans ce départ : exotisme, aventure, projet familial, changement d’école, nouveaux amis, changement de job. Et alors on essaie de les transformer dans une autre recette. Est-ce que ce sera un voyage en famille ? Un bilan de compétences ? Un changement de job ?
Faut-il se préparer à l’échec dans le cas d’une préparation à l’expatriation ?
Cela dépend de votre nature. Mais la plupart ne le font pas et c’est, encore une fois, ce qui fait la beauté du projet d’expatriation. On peut cependant se donner des indices de confiance et avancer ainsi en connaissance de cause.
Marie-Dominique Quignon
Française, expatriée aux USA et en Arabie Saoudite, Marie-Dominique Quignon est une coach professionnelle certifiée (iPEC-USA), spécialisée en développement du leadership et accompagnement des transitions professionnelles en particulier la carrière du conjoint expatrié et le Job Booster Cocoon. Elle a 30 ans d’expérience en management d’équipes Innovation et R&D dans l’industrie. Elle exerce à Orsay en France et à Riyad en Arabie Saoudite.
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