Le harcèlement scolaire – du point de vue de celui qui agresse

harcèlement scolaire

On entend beaucoup parler, heureusement sans doute, de ce sujet douloureux ces jours-ci. A travers l’actualité (le suicide du jeune Lucas en septembre), mais aussi grâce à des journées de mobilisation, comme cela a été le cas en France, le 9 novembre dernier. Et pour nos petits expats qui rencontrent déjà mille défis liés à l’expatriation, cette épreuve n’en est pas plus facile à l’étranger. Impossible de faire le tour de la question en un article, mais voici quelques ressources, des témoignages et quelques éléments de réponses à des questions que vous vous posez peut-être.

Qu’est-ce que le harcèlement scolaire ?

Pour que l’on puisse conclure à un harcèlement scolaire, il faut qu’il y ait souffrance liée à une situation qui se répète.

Ces violences sont multiformes :

  • physiques comme une tape derrière la tête à chaque entrée en classe ou des coups ou des violences sexuelles, etc. ;
  • matérielles comme des lunettes cassées ou des vêtements déchirés etc. ; mais aussi, un verre renversé tous les jours sur un plateau à la cantine.
  • psychologiques, dans ce cas les violences sont soit directes (insultes, intimidations), soit insidieuses (chantage, mise à l’écart du groupe). J’insiste sur le fait que les violences insidieuses sont souvent les plus dévastatrices sur le plan psychologique, et, de nos jours ;
  • le cyberharcèlement sous forme de photos compromettantes ou d’insultes anonymes.

L’isolement comme arme commune du harceleur

Emmanuelle Piquet, spécialiste des souffrances en milieu scolaire insiste sur l’isolement des victimes. Dans une vidéo, elle déclare : « Environ 40 % des cas qui nous sont amenés en cabinet sont des cas, non de harcèlement au sens explicite du terme, avec des insultes, avec du racket avec des violences. Non ce sont des cas d’isolement. Des cas d’ostracisme. Ce sont des cas d’enfants qui sont totalement exclus de la bande, ou du monde, en fait. » (Source : Linkedin/)

Enfants harceleurs : quels sont leurs profils ?

La psychologue Hélène Romano présente les trois types de profils :

  • les suiveurs. Ils ne sont pas à l’initiative du harcèlement mais suivent le groupe sans trop savoir pourquoi, parfois précisément par peur d’être harcelés à leur tour.
  • Les meneurs. Ils sont à l’origine du harcèlement. Dans certains cas, l’élève qui porte des coups sur un autre n’est pas le véritable responsable dans la chaîne des responsabilités. Dans le registre de la manipulation, il n’est pas rare qu’un élève A exerce des pressions psychologiques sur un élève B qui, lui, porte les coups sur C.
  • Les enfants qui répètent des traumatismes. Ils ont été eux-mêmes harcelés et répètent un schéma sans le comprendre.

Enfants harceleurs : pourquoi un tel comportement ?

Dans un ancien article de FemmExpat, Etienne Duménil, spécialiste de la question scolaire et des difficultés psychologiques des enfants et adolescents remarquait que les raisons qui poussent les élèves à être dans une problématique de harcèlement dépendent justement de cette typologie :

  • les harceleurs suiveurs. Ce qui les motive, c’est l’appartenance au groupe. L’estime d’eux-mêmes des enfants harceleurs est dépendante du regard des autres sur eux. Ils vont harceler pour prouver leur valeur personnelle au clan
  • les leaders. Il apparaît plus difficile d’expliciter le pourquoi de leurs agissements. La plupart du temps, il s’agit de bons élèves qui ont une image positive d’eux-mêmes. C’est pourquoi les parents des enfants harceleurs tombent des nues. Ils ont beaucoup de mal à croire ce que l’école peut dire sur leurs enfants chéris : les harceleurs-leaders sont de fait très doué pour la manipulation. Ils « passent inaperçu » et sont souvent les délégués de classe.
  • les harcelés harceleurs. Ils représentent une minorité des élèves auteurs de harcèlement. Leurs conduites sont parfois inquiétantes. En consultation, ils apparaissent souvent perdus car ils ne comprennent rien de ce qui leur arrive. Ils agissent plus par réflexe, dans une logique de compulsion.

Lire également son article sur le blog d’Eutelmed

Que faire si son enfant est victime de harcèlement scolaire ?

On le sait, la scolarité de nos enfants expats est un parcours plein de défis : déménagements successifs, nécessité de se réadapter fréquemment à un nouveau système, obstacle de la langue, différences culturelles… cette situation, liée à l’écart de l’enfant par rapport au groupe social existant, pourrait en faire une victime plus facile. Que faire, nous, parents expats ?

  • Rester à l’écoute. Surveiller les signes qui peuvent inquiéter : la tristesse en premier lieu, un abattement, une mélancolie et peu de communication de sa part. Un refus d’aller à l’école, ou la peur de s’y rendre. N’hésitez pas à interroger le personnel de l’école, ou des amis. Vous pourrez aussi être alertée par le témoignage d’un tiers, un camarade de classe par exemple, ou le parent de celui-ci.  
  • Faire appel à un psychologue si besoin, ne pas attendre. L’intervention d’un tiers est un appui pour votre enfant et déjà un signal qu’un adulte entend sa détresse. La position des parents est toujours délicate : d’un côté, le souhait de protéger son enfant et de lui montrer que l’on est là pour lui, de l’autre, le risque qu’il prend, en souhaitant intervenir de lui-même, à empirer la situation.  
  • Profiter des très nombreuses ressources disponibles :
  • A noter que le passage en enseignement à distance est une option envisagée par certains parents, comme le rappelle cet article publié par CEDRE France
  • Communiquer sur les outils mis à la disposition des élèves et des familles : un numéro national est le 3018 mais accessible sur 3018.fr par Tchat en direct, via Messenger et WhatsApp. Il existe également l’application 3018.

Un sujet pris en main par l’AEFE et la MLF

Tant l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) que la Mission laïque française (MLF) ont renforcé leur action en cette rentrée 2023. L’AEFE s’est dotée d’un plan d’action « climat scolaire » dont l’objectif cette année est le déploiement du programme pHARe. Elle consolide son réseau de 32 formateurs « climat scolaire » à l’étranger, formateurs dont la mission est d’accompagner les établissements dans la mesure du climat scolaire, la prévention des violences et du harcèlement, et la prise en charge des situations de harcèlement. A la MLF, des « référents harcèlement » sont désignés dans tous les établissements du réseau MLF monde (établissements en pleine responsabilité, établissements partenaires, écoles d’entreprises) volontaires, pour agir sur le terrain, déployer des formations nécessaires auprès des équipes pédagogiques et personnels d’encadrement.

Voir le message du Ministre Olivier Becht aux élèves, parents et enseignants français à l’étranger à l’occasion de la journée de mobilisation.

Une prévention indispensable, dès les plus jeunes classes

Etienne Dumesnil insiste : « à l’instar des pays nordiques et du Canada, les études prouvent toute l’efficacité d’un focus très précoce sur le harcèlement scolaire. La prévention par l’acquisition de compétences psychosociales dès la maternelle est certainement celle qui donne les meilleurs résultats sur le long terme. C’est pouvoir interagir en s’affirmant dans le respect des autres, en acceptant les différences. » Bien entendu, la prévention ne garantit pas le zéro harcèlement, mais limite le nombre d’enfants exposés.

Harcèlement scolaire : vos témoignages à l’étranger

« Dans la petite école primaire néerlandaise de mes enfants, il y a un programme spécifiquement dédié à prévenir le harcèlement scolaire, et surtout à instaurer de bonnes relations et un esprit de communauté. Ça s’appelle « l’école pacifiée » avec un enseignant dédié à ce sujet. C’est un sujet qui fait partie du cursus dans toutes les classes, au même titre que les maths, l’orthographe etc. Au début de chaque année, les élèves se mettent d’accord sur une charte de bonne conduite qu’ils définissent ensemble et qu’ils s’engagent à tenir. Cela les pousse à réfléchir aux genre de règles qu’ils veulent se donner pour fonctionner en tant que groupe. Par exemple « On n’exclut personne » était une règle dans la classe de CE1 de ma fille.

Les enfants en classe équivalente au CM1 se portent candidats pour devenir médiateurs (lettre de motivation et suggestion de leurs pairs), ils suivent une formation pour le devenir, et sont ensuite en poste dans la cour de récré pour aider les élèves à résoudre leurs conflits, et cela 1 jour par semaine.

Ce n’est pas magique, loin de là, cela n’évite pas les conflits. Mais je trouve intéressant qu’on réfléchisse, dès les petites classes, à aborder le sujet de « on est tous ensemble une communauté, chacun est différent et à sa place ».

Lorsqu’il y a des problèmes relationnels installés (malgré le programme) qui créent une mauvaise ambiance en classe, l’école fait appel à des prestataires externes qui apportent des jeux de rôle pour apprendre à communiquer sur les émotions, pour apaiser les tensions.

Encore une fois, rien de magique, tous les conflits ne se résolvent pas d’un coup car ça ne dépend pas que de ces outils, mais j’aime la démarche de prévenir, d’instaurer les bons réflexes dès le début de la scolarité. »

Luce témoigne également depuis le Royaume-Uni :

« Malheureusement pour nous, l’école n’a pas agi et nous avons dû prendre la décision de changer d’école pour la sécurité de notre fille… et cela malgré une « anti-bulying policy » qui n’était en réalité pas appliquée. En revanche, notre fils vient de commencer le collège et un seul incident isolé a été traité avec sévérité et du coup aucun autre incident ne s’est produit par la suite. »

Marion dans le système québécois témoigne :

« Au Québec il y a des programmes obligatoires au sein des écoles. Mon fils de 12 ans qui est entré dans une nouvelle école l’an passé à eu des soucis de harcèlement scolaire. Nous l’avons signalé à la direction. A la suite de cela les enfants concernés ont été reçu un à un et les parents appelés. »

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