Retrouver l’Europe après 3 ans d’absence – mon départ de Pékin cette semaine

départ de Pékin

Sim Sim est autrichienne et vient de passer 6 ans en poste à Pékin. Elle nous livre quelques réflexions à chaud, quelques heures après son arrivée à Vienne, où elle vient de retrouver ses parents après 3 ans d’absence.

Quand as-tu décidé que la Chine, c’était fini pour toi ?

C’est une décision que j’ai prise il y a quelques mois, pour des raisons professionnelles et personnelles, mais la situation récente à Pékin et à Shanghai avec le COVID m’ont confirmé que les choses n’allaient pas s’arranger de si tôt.

Certes, nous avions eu une belle vie pendant que le reste du monde luttait contre la pandémie. Mais le problème c’est que la Chine a en quelque sorte fermé ses frontières pour se protéger. De mon côté, je n’avais pas vu ma famille depuis 2 ans et demi. Et je savais que les frontières ne rouvriraient pas de sitôt. Alors il était temps.

Vu l’exode des étrangers de Chine en ce moment, je n’étais pas la seule à ressentir cela. Parmi mes connaissances, une bonne douzaine de gens prévoient de partir, immédiatement ou dans les mois qui viennent. Y compris des gens qui d’après moi seraient restés encore plusieurs années.
Mais malgré les nombreuses frustrations et obstacles, je garderai d’excellents souvenirs de ma vie à Pékin, des expériences incroyables que j’ai vécues et des gens que j’ai rencontrés.

Comment ça se passe, techniquement, un départ de Pékin en ce moment ?

Quand on quitte un pays, c’est toujours dense : contacter les déménageurs, vendre et donner des articles que l’on n’emporte pas avec soi… Partir de Chine est un peu plus difficile : il faut sortir son argent de la banque, régler les affaires avec le bureau des impôts, s’assurer que tout est ordre parce qu’il sera impossible de le faire de l’étranger. Mais la situation récente a Pékin où des résidences entières se sont soudain trouvées en ‘lockdown’ a encore exacerbé ces problèmes : déménageurs interdits de passage dans des quartiers, banques fermées, taxis ne circulant plus dans certains districts. Comment alors arriver à l’aéroport ? Ces derniers mois, nous vivions tous un niveau de stress assez élevé.

Heureusement, la ville s’est rouverte depuis quelques semaines.

Mais le plus dur, c’est de réussir à attraper un vol…

En effet. J’avais d’abord réservé un vol direct sur Austrian Airlines en avril. Mais celui-ci a été annulé. Je me suis donc rabattue sur le Lufthansa pour Francfort. J’étais confiante, car il avait été fiable jusque-là. Beaucoup de gens avaient réservé ce vol, au point qu’il y avait même un groupe WeChat dédié juste à ce vol hebdomadaire. Il faut savoir qu’il n’y a que très peu de vols internationaux en partance de la Chine en ce moment. Pékin en a suspendu une grande partie pendant la pandémie et continue régulièrement à annuler des vols lorsque quelques cas de COVID sont détectés à bord.

Ce qui n’est pas un problème en soi. Sauf quand on a mis toute sa vie en boite et rendu les clés de son appartement. Que faire alors si le vol est annulé et que le prochain n’est qu’une semaine plus tard ?

Alors, quand Lufthansa a annulé son seul vol Pekin-Francfort il y a quelques semaines, cela a été un peu la panique. De mon côté, je ne comptais prendre l’avion que quelques semaines plus tard mais face à l’incertitude concernant ce vol, la question s’est soudain posée : est-ce que je devrais réserver un deuxième vol, juste au cas où ?

Quel stress…

Ce qui était vraiment douloureux c’était que ces annulations ne frappaient pas simplement des gens qui partaient en vacances. C’était des gens qui essayaient de sortir du pays et déracinaient leur vie entière. Je plaisantais à moitié quand j’ai dit à un ami que c’était comme des vols d’évacuation : parce qu’il y en avait si peu et tellement de gens voulaient monter à bord.
Je sais que des histoires de voyages chaotiques, nous en avons tous connu ces dernières années. Mais comme je le disais, c’est différent quand on quitte un pays comme la Chine en pleine pandémie. Avec les annulations de vols, des familles entières ont été laissées en plan, beaucoup de gens qui comptaient voyager avec leur animal domestique ont vu leurs plans soigneusement préparés tomber soudain à l’eau. Sans compter que certaines personnes avaient des visas qui étaient sur le point d’expirer.

Bref, la situation était très stressante… Et quelle façon bizarre de partir. J’ai passé mes derniers jours a Pékin à vérifier nerveusement les groupes WeChat toutes les heures pour voir s’il y avait des mises à jour, et à discuter avec d’autres amis qui partaient de plans B et C en cas d’annulation. Plutôt que de profiter de la ville, de sortir avec mes amis et de prendre le temps de dire au revoir a tout le monde.
Mais en fin de compte, je pense que la priorité pour beaucoup était juste de partir, peu importe comment ! J’ai donc pris un billet avec Air France de Pékin à Paris : le 3e vol que je réservais pour mon retour. Et heureusement que je l’ai fait parce que le vol de Lufthansa a été effectivement annulé de nouveau le week-end dernier. Mais j’avais aussi de la chance de pouvoir me le permettre: si vous êtes une famille de 5, ce n’est pas si évident de réserver 3-4 différents vols avec différentes compagnies aériennes.

Et la suite alors ?

Entre faire les valises, faire des tests COVID et vérifier pour la 100e fois que je pouvais rentrer en Europe sans paperasse supplémentaire (on devient un peu parano quand on vit en Chine où les règles peuvent changer du jour au lendemain !), j’ai à peine eu le temps de réaliser que je partais.

Heureusement, beaucoup d’amis partaient aussi, ce qui a rendu les adieux un peu plus faciles car je savais que je les reverrais bientôt, en Europe ou ailleurs. C’était bien plus difficile de dire au revoir aux amis proches qui restaient en Chine.
Quand on a passé 6 ans dans un endroit, c’est toujours un peu aigre-doux de partir. On se réjouit de la suite, mais on laisse aussi un peu de soi-même là bas.

Et qu’as-tu ressenti en montant dans l’avion ?

Apres des semaines de stress et d’anxiété, tout s’est déroulé assez facilement dès l’arrivée a Beijing Capital International Airport. Enregistrement, passage des douanes, contrôle des passeports et un contrôle de sécurité très minutieux.

Ce qui était plus étrange c’était que le terminal était quasi désert. Mon vol était le seul en partance ce soir-là, et tous les magasins, restaurants et bureaux de change étaient fermés.

L’arrivée vers l’avion était incroyable : tout le monde a commencé à prendre des selfies et des vidéos et on sentait un grand soulagement collectif. Ça y est, on y est presque! Le capitaine de bord a même fait une annonce du genre « Mesdames, Messieurs, dès que les portes seront fermées, vous serez en France ». Il y a eu des applaudissements.

Le reste du vol Air France était impeccable : bon service, repas, divertissement en vol (d’autres vols en partance de Chine avaient apparemment eu un service très basique). Un autre passager a même demandé un verre de champagne avec son repas. Il y avait de quoi fêter !

J’avoue quand même que ce n’est que lorsque j’ai vraiment mis pied sur le sol européen que j’ai pu respirer librement. Après tous les problèmes des mois précédents, je m’attendais encore à des déboires jusqu’à la dernière minute ! Mais malgré les grèves à Paris, la connexion s’est faite sans problèmes et mes valises sont arrivées à destination. En fin de compte, le voyage fut étonnamment facile et agréable.

Et tes premières sensations ?

C’était une drôle de sensation d’atterrir à Paris et de voir que beaucoup de gens ne portaient pas de masques. Et aussi de voir de telles foules à Roissy, après le terminal désert de Pékin la veille.

A J+ 2, je me sens encore un peu entre deux mondes : Pékin me semble à des années-lumière mais je ne suis pas encore mentalement complètement de retour en Europe. L’autre jour, en voulant aller au supermarché, je me suis soudain demandée: « Puis-je y aller si je n’ai pas de vaccin mRNA ? ‘ puis ‘ est-ce que je dois scanner une application pour entrer ? ».

S’adapter au monde en dehors à la Chine va me prendre un peu de temps… Mais quel soulagement d’être arrivée à bon port !

7 juillet 2022

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