Les parents d’élèves expatriés ? Décryptage depuis la salle des profs

Parents-enfants-expatries-UNE femmexpat 559x520L’avez-vous remarqué ? L’école vient en première place des sujets de conversation favoris des mum expats qui s’y croisent et s’y retrouvent généralement comme des agents secrets devant leur QG…

Avez-vous également noté que le monde de l’école et celui des parents sont un peu comme la RDA et la RFA juste après la chute du mur ? Il y a bien des protestations d’amitié, des tentatives de collaboration, des copinages risqués, mais au fond… on se méfie un peu et de part et d’autre. On se surveille !

Billet d’humeur d’une prof… et parent d’élève expat !

 

Je connais mon sujet : l’école c’est toute ma vie

Prof’ par vocation, l’école, j’’y pense tout le temps. D’ailleurs, ça commence à prendre pas mal de place sur mon CV avec 4 établissements français à l’étranger et pas mal de bahuts en France.

Mais – que cela reste entre nous – je suis aussi une taupe ! J’ai été une sorte d’agent double durant une petite année, infiltrant l’air de rien les parents d’élèves, allant même jusqu’à les représenter dans une association.

Puis tranquillement, j’ai retourné ma veste et viré à l’ennemi sans prévenir : j’ai retrouvé mon métier de toujours, le seul que je sache faire, mais que je me targue d’exercer correctement : professeur des écoles.

 

Des anecdotes sur les parents, vous vous doutez bien qu’il s’en échange pas mal à la cantine

C’est de bonne guerre, non ? Pendant que vous nous éreintez au cours de cartonnage ou au café rencontres, nous on échange aussi !

Au-dedans, on a nos célébrités :

  • Les enquiquineurs patentés qu’on se refile de classe en classe en faisant un roulement pour que ce soit juste.
  • Les parents « bons plans », toujours prêts à aider. Ceux qui débordent d’idées mais avec qui on va garder une saine distance car on sent l’invasion possible.
  • Les agressifs, qu’on ne reçoit jamais seule si on est une femme.
  • Les agitateurs, les confiants, les à bout, les déprimés

En 25 ans de métier, et avec 5 enfants, j’ai reçu pas mal de parents mais aussi vu bon nombre de profs… J’essaie depuis peu de prendre un peu de recul et de regarder de loin cette question des relations parents/ école.

Elle m’amuse et m’intéresse à la fois.

 

Me voici donc parendélèvologue d’un jour

Et comme tout bon chercheur, je catégorise :

 

La Mum en break professionnel N°1 

Avant d’être expat, elle bossait comme une folle. Son enfant, elle ne l’a pas vu grandir entre crèche et nounou… et voilà qu’elle se retrouve femme au foyer, pas tellement habituée au temps libre ni à la maison.

Cette expatriation tombe à pic pour recentrer un peu ses priorités. C’est décidé, elle sera une mère pro ! Elle est à toutes les réunions, boit toutes vos paroles et n’en oublie aucune. Elle pose plein de questions, prend un rendez-vous par mois et regarde tous les cahiers à la loupe. Certes, elle vous respecte, mais vous fait sentir que vous n’avez pas la même culture. Ex-DRH, on sent qu’elle meurt d’envie de vous réorganiser l’équipe pédagogique. Et elle vous dit sur le ton de la confidence qu’elle a halluciné en voyant l’organigramme dément de l’établissement.

Pragmatique, elle admet que ça n’explique pas le 3 en math de Gédéon. Mais aussitôt, elle vous avoue, piteuse, que si Gédéon a failli c’est à cause d’elle. Parce qu’elle a eu une réunion de l’Association de parents d’élèves la veille de l’interro. L’idée que Gédéon ait pu avoir une petite faiblesse est exclue. Gédéon, c’est elle, « la carne de su carne », le 3 en math, c’est elle aussi ! D’ailleurs, c’est décidé, elle annule le WE entre amis prévu car il y a contrôle d’histoire le lundi suivant. Et franchement, ce n’est pas très raisonnable : Gédéon est quand même en CM1 !

 

La Mum en break professionnel N°2 

Avant d’être expat’, elle bossait comme une folle, elle aussi… Son enfant, du coup, il est habitué à se débrouiller seul. Et il est devenu super autonome, pas comme tous ces gosses d’expat’s assistés. Elle, elle est bien décidée à prendre du temps pour que l’artiste qui sommeille en elle sorte de sa léthargie.

Alors, les réunions, elle les zappe (« quand t’en as fait une tu les as toutes faites…« ). Les rendez vous elle les oublie ou les annule au dernier moment (la prof de sculpture n’a pas pu décaler le cours…). Elle n’est jamais à l’heure et est persuadée que personne ne s’en rend compte.

Quand, par bonheur, vous avez réussi à la coincer pour évoquer les 3 en maths répétés de Gudule, le contrôle non signé et les cahiers oubliés, elle vous explique avec autorité que, ex-DRH, elle est convaincue qu’on n’apprend que de ses erreurs. Et que c’est justement ce que Gudule expérimente. Elle ajoute que Gudule manquera une semaine car elle l’emmène à un séminaire sur la céramique en province.

 

Le père ado rebelle

Il a eu lui-même un passé douloureux avec l’école et il lui reste des comptes non soldés. Quand vous lui expliquez avec moult précautions que son Gaston peut exprimer sa créativité et révéler sa personnalité autrement qu’en scalpant ses petits camarades, il prend ça pour lui. Il vous regarde d’un air narquois : pas étonnant qu’avec des éducateurs comme vous, les mômes aient envie de se rebeller. 

Lui-même, les notes ça l’a toujours rendu agressif et les profs, il les met dans le même sac que les flics. Alors vos conseils et vos remarques, il s’en tape comme de l’an 40. Et il vous le dit. Il ne vous demande qu’une chose, c’est de ne pas « brimer » son Gaston.

 

Les parents psy

Ils ont lu tout Dolto, ils militent contre Naouri qui est vraiment trop simpliste, et ils problématisent tout.

Vous dites « énoncés », « lecture de consignes », « goût de l’effort et du travail bien fait ». Ils vous répondent : « construction de soi », « self estime », »self confidence »… (ils ont lu en anglais aussi pour être sûrs de ne rien rater).

Vous pensez qu’une réponse éducative serait dans un premier temps suffisante. Vous vous gardez bien de le dire car on ne vous paye pas pour ça. Mais vous voyez bien que pour faire apprendre les tables de multiplications, il vont prendre conseil auprès du psy.

 

Les parents d’un génie

Vous ne connaissiez pas encore Gertrude mais avant son arrivée, vous aviez déjà un mail de 2 pages de son père vous expliquant que ça ne collerait pas avec le système car Gertrude est probablement surdouée.

Le mail vous offre également le mode d’emploi de Gertrude, les aménagements qu’il faudra prévoir. Ordinateur au lieu de crayon -la précocité gêne Gertrude dans son graphisme. Place particulière dans la classe – Gertrude a du mal à se concentrer…

Depuis 25 ans, vous traînez vos guêtres dans toutes les écoles de la planète, des enfants précoces, des vrais, vous en avez rencontré et vous commencez à en connaître un peu le profil. Gertrude ne vous semble pas correspondre. Mais bon, vous gardez ça pour vous…

 

Les parents de la « bonne école » 

Quand ils sont arrivés chez vous, leurs enfants venaient d’une « bonne école » et de retour à Paris, ils retourneront dans une « bonne école ». (Une bonne école est implicitement située à Paris !)

D’ailleurs, eux-mêmes ont grandi dans de bonnes écoles. Çà ne se voit peut-être pas à l’orthographe des billets qu’ils vous envoient pour excuser l’absence de Genièvre. Mais pour le reste, ils sont au top. Ils vous demandent juste de ne pas trop harasser Genièvre dans les bulletins car le sésame de la bonne école, c’est le carnet de notes, bonnes de préférence.

Là, c’est vous le chef : vous prenez donc l’avantage et en profitez pour vous renseigner perfidement sur les critères de « bonnécolitude« . La réponse vous permet en général de passer un bon moment avec vos collègues (qui ont aussi mauvais esprit que vous) à la cantine.

 

Les parents nostalgiques

Ils recherchent une sorte d’imagerie scolaire d’Epinal, blouses grises, vieux cuir et encriers.

Ils viendront tout émus vous remercier dès que vous donnerez une poésie de Victor Hugo, dès que vous prononcerez les mots méthode syllabique, dictée et copie… Si en plus vous pouvez ajouter un petit classement des élèves pour accompagner la remise des bulletins, ils vous mangeront dans la main !

Le parent nostalgique est en général un gentil, émotif, prêt à se mettre en quatre pour aider la classe. Si lors d’un dîner en ville avec des nostalgiques, vous glissez l’air de rien que vous avez connu jadis l’école publique et la cité des Tarterêts, vous ferez votre petit effet. On vous regardera avec des yeux écarquillés, voire admiratifs, comme si vous arriviez tout droit d’une mission hyper dangereuse.

 

Le parent pressé 

Il veut que Gilbert soit « challengé », qu’il ne s’ennuie pas en classe, qu’il ne perde pas son temps. Et logiquement, la réponse attendue c’est l’année d’avance.

Vous objectez que les sinus et les cosinus, vous n’avez rien contre, mais que pour Gilbert, les priorités des priorités c’est d’apprendre à demander pour faire pipi et de savoir enfiler son manteau tout seul. Accessoirement de se servir d’un crayon pour écrire et non pour pilonner la table.

Son père vous attend au tournant avec sa propre biographie comme argument majeur . Une histoire de classe prépa, de mononucléose et d’année d’avance salutaire pour « cuber » sans dommage… Vous regardez alors Gilbert et vous réalisez qu’à 4 ans, son avenir se dessine déjà en classe prépa avec une forte probabilité de longue maladie. Courage petit Gilbert ! Il va falloir te montrer à la hauteur !

 

Le parent « antidécadent » 

Il est rare, mais je l’ai rencontré. Il voit en tout enseignant un agitateur professionnel, doublé d’un dangereux révolutionnaire marxisto- léninisto -grévisto-écolo, symbole et responsable du relâchement des mœurs actuelles.

En fait votre seule présence l’agresse à priori. Il n’aime pas vos vacances, votre hiérarchie, votre « absence de culture du résultat » (sic) votre relativisme et votre pédagogisme.

 

Les parents profs  

Ils ont toujours un air sympa et entendu du genre « vous et moi on se comprend, on est du même sang ».

A la réunion de parents, ils se taisent, respectueux. Ils attendront le lendemain pour venir vous poser des questions techniques dignes de votre inspecteur.

Le problème avec le parent prof, c’est qu’il repère vite vos faiblesses pédagogiques, les vraies. Quand Gérault apprend ses premières multiplications, c’est sans malice qu’il laisse échapper des remarques déstabilisantes : « Mon papa il était étonné qu’on n’ ait pas d’abord fait comme ci et comme ça… »

Le parent prof, fort de son expérience, a bâti un ensemble de règles qui s’appliquent à tous sauf à Gérault : la ponctualité, la signature des cahiers, l’exigence… Ça ne l’empêche pas de repérer un cours mal préparé et d’en « plaisanter » avec vous. Le parent prof est notre hantise à tous !

 

Et pour faire bonne mesure, sachez que je suis moi-même un beau mélange d’au moins quatre catégories… ça relativise. Et malgré les apparences, ça me donne une grande tendresse et une grande indulgence pour les parents, toutes catégories confondues !

 

Germaine-Gisèle, prof et parent d’élèves, expatriée

 

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