Témoignage : une enfance d’ambassades en ambassades

enfance ambassades

On parle souvent de la prégnance de la « boîte des parents » pour les enfants expats. Mais qu’en est-il pour les enfants d’ambassadeurs ? A quoi ressemble en réalité le quotidien de ces enfants ? Privilège ? Pression ? Nous avons rencontré Loïc, fils d’ambassadeur actuellement en stage à Washington DC. Pour FemmExpat, il revient sur ses jeunes années de vie itinérante. 

Loïc, à quoi ressemble une enfance en ambassades ?  

« J’ai eu la chance d’habiter dans cinq pays et trois continents. J’ai d’abord vécu sur le continent Africain, à Brazzaville et à Casablanca, pendant 6 ans avant de déménager à Paris. Après uniquement un an dans la capitale française, mon père a été nommé Chef de mission diplomatique au Brésil. Nous avons dû déménager à Brasilia pendant presque cinq ans. Puis, lorsque je venais à peine de me sentir comme à la maison, mon père fut nommé Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire en Fédération de Russie. Je ne voulais pas quitter le Brésil et me mélanger encore à un autre univers. J’ai donc préféré retourner à Paris avec mes frères et sœurs, mais je me rendais souvent à Moscou. En 2017, mon père fut nommé Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire en Confédération Suisse où je suis resté trois ans dans un établissement international à Genève. Et enfin, après mon bac j’ai décidé de poursuivre mes études à Paris. »

Comment vivais-tu ces changements de pays ? 

« Quand on est jeune, l’intégration est généralement plus fluide. Je ne voulais plus partir, je redoutais la date où mon père allait être appelé à d’autres fonctions dans un autre pays. L’intégration dans certains pays était plus facile que dans d’autres, par la différence culturelle, de mentalité et aussi par rapport à la langue. J’ai eu du mal à m’intégrer en Russie. Je vivais depuis tout petit dans des pays où la population était plutôt ouverte en termes de mentalité, mais le contraste avec les Russes fut fulgurant. »

On imagine souvent les enfants d’ambassadeurs manger des petits fours à longueur de journée, mais est-ce vraiment cela ? Comment était ton quotidien, voyais-tu souvent ton père ? Était-il différent des autres expatriés ?  

« J’ai souvent entendu ce préjugé qui dit que « les enfants d’ambassadeur mangent des petits fours à longueur de journée » ou « reçoivent une éducation différente et n’aiment pas se mélanger ». Peut-être qu’il y en a, mais en ce qui me concerne ce n’était pas le cas. Mon quotidien n’était pas si différent des autres enfants de mon âge. En semaine j’allais à l’école, je pratiquais des sports collectifs en club et quand j’avais du temps libre je sortais jouer avec mes amis. Le week-end généralement c’était repos, je passais du temps avec ma famille et parfois on faisait quelques activités ensemble. Rien de bien anormal. C’est vrai que quelquefois, lorsque mon père avait des cérémonies officielles, j’ai été amené à l’accompagner lorsque les membres de la famille étaient aussi invités. Mais cela n’arrivait pas très souvent. 

Lorsque j’étais plus jeune, même quand j’habitais avec lui, on ne se voyait pas si souvent. Durant la semaine, entre les réunions, les cérémonies et les voyages, on n’avait pas le temps de rester ensemble. La plupart du temps, c’était une nounou qui me gardait. On profitait parfois du week-end pour faire des activités ensembles quand il avait le temps. »

Les autres enfants te voyaient-ils différemment du fait du statut de ton père ? Est-ce que tu le cachais, en étais fier ou au contraire en avais honte ?  

« Je ne parle généralement pas de ma vie personnelle, je ne le cachais pas non plus, si on me posait des questions je répondrais honnêtement. Les autres enfants pouvaient le savoir, mais cela ne changeait rien parce que malgré cela, je me suis toujours comporté comme un enfant normal et je n’essayais pas d’en jouer pour avoir une quelconque influence. Tout dépend des principes et valeurs inculqués et de l’éducation reçue. J’ai toujours appris à rester humble, être tolérant, respecter mon prochain en toute circonstance et surtout m’auto-estimer pour n’avoir rien à prouver à personne. Tout cela pour dire qu’il n’y avait pas de raison pour que les autres enfants me voient différemment. 

Est-ce que j’étais fier ? Oui, bien sûr, c’est toujours une fierté d’avoir quelqu’un de sa famille qui a réussi, surtout dans ce domaine. Pourquoi en avoir honte ? Mais à mes yeux, il reste toujours mon père avant tout statut. »

On dit souvent que les enfants expats deviennent expats à l’âge adulte. Est-ce qu’on peut dire que tu as choisi de suivre les pas de ton père ?  

« Ce serait mentir si je disais que le travail de mon père n’avait pas influencé mon orientation. 

Voyager avec lui a suscité en moi un grand intérêt pour le monde diplomatique. Dans le cadre de mes études, j’ai pu effectuer un stage à l’ambassade en Suisse. C’était très intéressant, surtout que Genève est cosmopolite. De nombreux organes et organisations spécialisées des Nations Unies y sont présentes. J’ai pu observer un monde diplomatique très animé. 

Cela dit, nous vivons dans un monde où il est important d’être polyvalent professionnellement. C’est pour cette raison que j’ai tout de même voulu acquérir des compétences dans le domaine du business international, management et marketing. 

De mon expérience d’enfant de diplomate, je garderai sans doute le côté international, mais j’ai d’autres ambitions qui m’animent tout autant. »

Quel regard portes-tu aujourd’hui sur cette enfance ? 

« Il est vrai que passer mon enfance en ambassades, voyager, changer de foyer, de culture et de fréquentation assez régulièrement n’a pas toujours été facile. Cependant, je sais que ce que j’ai vécu jusque-là m’est bénéfique aujourd’hui, et le sera dans le futur. Cela m’a permis de sortir de ma zone de confort à plusieurs reprises, surmonter mes peurs, forger mon caractère et ma personnalité, apprendre à m’ouvrir aux autres, et surtout, à développer mon ouverture d’esprit. »

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