D’une carrière dans la pub en France… à la direction de la CCI en Ukraine : le parcours de Maud

CCI - France Ukraine - Parcours Maud Joseph

« Moi, quitter mon job chez France Télévisions pour te suivre en Ukraine ? C’est une blague ! » C’est ainsi que démarre le parcours d’expat de Maud Joseph, actuelle directrice de la CCI franco ukrainienne, que FemmExpat a rencontrée cette semaine.

Une carrière bien lancée dans la com’

Maud démarre sa carrière en tant que chef de groupe au sein du Syndicat professionnel de la publicité télévisée, à Paris et se poursuit chez France Télévisions Publicité, où elle occupe le poste de responsable de la communication. Deux jeunes enfants, une belle routine… jusqu’à ce jour, que de nombreuses expats connaissent : une proposition sérieuse pour son mari… à Kiev. La première réponse de Maud est sans appel.  « C’est une blague, je ne quitte pas mon job pour partir dans ce pays ». Il faut dire que fin 2012, l’Ukraine fait plus parler d’elle à travers des histoires de corruption, de femmes sulfureuses, de Tchernobyl que pour sa qualité de vie.

Un premier départ à reculons

Et puis c’est le départ, avec un projet de pause carrière, que Maud finit par accepter. Non sans difficultés. Elle se souvient :

« le plus dur, quand doit mettre fin à un job qu’on adore pour suivre un conjoint, c’est la période de la prise de décision. Ce moment, avant le départ, où l’on ne sait pas ce qui nous attend mais où les questions vous assaillent : vais-je dépendre de mon mari financièrement ? Que vais-je faire au quotidien ? Très vite pourtant sur place, heureusement, on oublie, on accepte une pause tout de même bien méritée, et surtout on est prise dans l’installation familiale, les enfants, la maison, etc. »

Sur place, le Kiev que Maud découvre ne fait pourtant pas rêver.

« On est en 2013, Kiev à l’époque, ce n’est vraiment pas New York, il fait froid et gris, les gens ne parlent pas anglais. »

Sans plus attendre, 15 jours après la rentrée scolaire, Maud se lance dans l’apprentissage du russe, qu’elle juge indispensable pour entamer une carrière dans la communication sur place :

« quand tu travailles dans la com et que tu es payée pour écrire et pour parler, il est indispensable d’apprendre la langue locale. »

Un choix que Maud ne juge pas forcément judicieux aujourd’hui puisque l’ukrainien est la langue du pays…, mais soit : elle se lance dans un apprentissage intensif « 3 heures par jour, tous les jours. Je ne voyais que ma prof de russe et personne d’autre. Dans ma tête, c’était mon nouveau job. »

Maïdan en novembre 2013 comme un déclic

Quelques semaines plus tard, alors que la famille est installée à 100 mètres de la place Maïdan, la révolution de la Dignité est en marche, quand en février 2014 des violences éclatent. Maud fait ses valises, se rend à l’aéroport et prend le premier vol pour la France. Elle se souvient alors d’un déclic :

« Et là, contre toute attente, je me dis, non c’est trop tôt, on ne quitte pas une expat aussi vite, j’avais vraiment cette mauvaise impression de quitter le navire ».

De retour quelques semaines plus tard, Maud comprend que sa vie est à présent à Kiev. Elle sent aussi qu’une nouvelle page se tourne pour le pays. C’est donc un nouveau départ qui pointe, avec un bébé et surtout un nouveau projet pro…

Des guides Eat in Kiev à la CCI franco-ukrainienne

Maud est catégorique :

« En 2015, la vie a changé du tout au tout en Ukraine. La vie est devenue bien plus sympathique, très facile à vivre en famille, avec une grande quantité d’espaces verts et surtout un sentiment de liberté incroyable ».

C’est dans ce contexte que Maud se lance dans l’édition du « Best Restaurants Kyiv » le premier guide des restaurants de Kiev entièrement rédigé en anglais et indépendant. Dans l’esprit de Maud : « au moins je n’aurai pas perdu mon temps, si on rentre demain, j’aurai quelque chose à raconter », dans la réalité : un succès. Le guide se vend bien, est vite connu de toute la communauté internationale, élargi à d’autres grandes villes. Ajoutez à cela un mandat de présidence à Kyiv Accueil et voilà le quotidien de Maud bien rempli.

En 2019, un poste se libère à la Chambre de commerce franco-ukrainienne. Maud, forte de son expérience au sein d’un syndicat professionnel et arrivant avec un projet fort est prise et prend ensuite la direction de la CCI. Au cœur de ses missions : faire vivre la communauté d’affaires franco-ukrainienne, créer des événements de networking pour cette communauté, renforcer les liens entre l’Ukraine et les entreprises françaises.

Et puis en février 2022 : l’invasion d’envergure de la Russie

Un départ précipité de toute la famille, mais pas de son poste. Maud explique :

« Aucune entreprise française n’a quitté le pays en février 2022. Nous ne l’avons pas quitté non plus. Avec le Covid, notre structure avait été habituée à des formats virtuels ou en semi-présentiels, nous avons donc facilement adapté notre organisation. Pour ma part, depuis l’invasion russe, je travaille entre la France et l’Ukraine… avec toutes les complications ce que cela implique en termes de transport, car il n’y a pas d’avions pour l’Ukraine : en optimisant au maximum, aujourd’hui je peux arriver de Paris à Kyiv en 12h30. C’est un minimum. »

Des projets qui perdurent, malgré tout  

Maud poursuit :

« Depuis la guerre, nous continuons d’organiser des rencontres, en présentiel notamment, car il y a un réel besoin pour les entrepreneurs français d’échanger. Nous avons également tenu à maintenir certains événements : le prix de la femme d’affaires ukrainienne, le 14 juillet et la soirée soirée caritative du Beaujolais Nouveau. Avec une adaptation à la situation de guerre : un sous-sol de repli en cas d’alerte, des relais starlink (internet haut débit par satellite), des générateurs… »

Quand on pose la question à Maud du moral des Ukrainiens, elle vous répond : « cela dépend de la nuit qu’ils ont passée. » Mais rapidement, elle souligne le courage des Ukrainiens, et des Ukrainiennes, dont elle a suivi les parcours en organisant le prix de la femme d’affaires ukrainienne, un événement qui ne s’est pas arrêté malgré le conflit.

« En 2023, nous avons reçu plus de 300 dossiers de candidature, avec des témoignages incroyables, à l’image de cette entrepreneure qui avait une marque de cosmétiques à Butcha, qui a tout perdu et relancé à nouveau. Elle est restée en Ukraine et exporte ses produits en Pologne, en Allemagne et aux USA. Ce prix, organisé par la CCI, c’est un signal fort que nous France envoyons à ces femmes, et là j’ai senti que notre mission avait vraiment du sens. »

Maud Joseph - parcours CCI Ukraine

L’avenir ? La victoire et la reconstruction

Dans les vœux 2024 de la CCI, on peut lire : « En 2024, nous souhaitons la victoire et plein de nouvelles rencontres ». Maud complète :

« depuis quelques mois, la CCI s’est donnée comme objectif de faire venir de nouvelles entreprises en Ukraine, pour aider à la reconstruction, mais surtout pour soutenir et accompagner la résilience des Ukrainiens. Les grandes entreprises sont encore frileuses et pourtant, il existe des garanties d’Etat, des structures d’accompagnement… et de l’espoir. Mon travail aujourd’hui, c’est de communiquer en France sur ce potentiel. C’est un peu notre mantra à la CCI Franco ukrainienne : « il faut s’intéresser à l’Ukraine ! ».

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