24 heures dans la vie d’une députée des Français de l’étranger – Eléonore Caroit

Eléonore Caroit - Députée des Français de l'étranger

Ça ressemble à quoi, la vie d’une femme, mère de famille et députée d’une circonscription à l’autre bout du monde ? Nous avons demandé à Eléonore Caroit, députée des Français de l’étranger, représentante des Français d’Amérique latine et des Caraïbes, et femme expat avant d’avoir été élue, de nous dévoiler un peu de son quotidien. Accrochez-vous, ça déménage !

Une journée type à Paris…

Vous le savez, la vie d’un ou d’une députée se partage toujours entre son activité en circonscription, et à Paris, à l’Assemblée Nationale. Mais quand ces électeurs se trouvent à 10 000 km de Paris et que sa circonscription rassemble un territoire aussi vaste que celui d’Eléonore Caroit (33 pays !), la journée type, on la vit plutôt en rêve. « Le plus simple, c’est peut-être de décrire une journée type à Paris… » nous dit la députée, que nous avons rencontrée en mars dernier dans ses bureaux de l’Assemblée.

7h : réveil des enfants

« Ma journée à Paris commence par un réveil à 07h00 du matin, quand ce n’est pas plus tôt. J’habille mes enfants, je les accompagne pendant leur petit déjeuner puis je les emmène à l’école vers 8h. Une journée de députée, à Paris, commence souvent par des petits-déjeuners de travail. Avec moi, inutile de les programmer avant 8h30, cet espace est réservé. »

8h30 – 10h : des rendez-vous avec les acteurs de terrain

« En fonction de mon implication dans le texte qui est en cours de discussion à l’Assemblée ce jour-là, je démarre avec un premier rendez-vous jusqu’à 10h. En général, ce sont des rencontres avec des acteurs de terrain : cela peut être le service des impôts des non-résidents, la Caisse des Français de l’étranger, la Banque de France, etc. Le plus souvent, j’y emporte avec moi des dossiers sur lesquels j’ai été sollicitée personnellement. Cela peut être des problèmes de ma circonscription que j’essaie de régler. Mais cela peut aussi être des rendez-vous politiques. Ensuite, je file à l’hémicycle. »

9h-13h : une matinée en hémicycle pour porter la voix des Français de l’étranger

Mon rôle quand je suis à l’hémicycle : Faire entendre la voix des Français de l’étranger, qui sont près de 3,5 millions. Défendre leurs intérêts au quotidien. Par exemple, cet automne, nous avons réussi à faire voter un amendement à la loi de Sécurité Sociale permettant le rapatriement d’urgence pour des femmes en situation d’urgence, vivant dans des pays interdisant l’IVG, ce qui est le cas de nombreux pays de ma circonscription.

Notre présence est essentielle sur un maximum de dossiers pour faire entendre cette autre façon d’être et de se sentir français, de voir la France. Aujourd’hui, même si parfois nos collègues nous prennent pour des députés un peu différents, on peut dire que notre voix est de plus en plus entendue. C’est pour cela qu’il est important de continuer à voter à l’étranger ! Trop peu de gens savent qu’il y a des députés qui les représentent en France, et qui les défendent au quotidien. C’est un luxe que d’autres nationalités nous envient ! »

Les mercredis ? En commission…

« Si on est mercredi, alors je suis en Commission des Affaires étrangères, qu’il m’arrive de présider. Si c’est mardi, alors je suis en réunion politique du groupe et réunion de porte-parole… »

13h : déjeuner (pas avec ses copines)

« Mon déjeuner c’est soit en Ministère ou avec d’autres élus pour faire avancer nos dossiers, soit un rendez-vous politique… mais ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas avec mes copines ! En réalité, cette heure de déjeuner me permet aussi de déplacer certains rendez-vous pour honorer d’autres événements, comme des colloques, sur des sujets qui concernent ma circonscription, etc. Mon agenda dépend du calendrier législatif, qui, lui, change tout le temps ! Donc le mot d’ordre pour toute l’équipe, c’est : flexibilité ! »

15h retour en séance (en baskets)

Eleonore-Caroit Députée des français de l'étranger

« La séance reprend à 15h00. Autant vous dire que si je porte souvent des talons, j’ai toujours des baskets dans mon sac. L’après-midi, en période de vote, je fais des allers-retours permanents entre mes rendez-vous, mon bureau… et l’hémicycle. Ou plutôt les couloirs de l’Assemblée. Parce que finalement, là où vous me verrez le plus souvent, c’est avec mes collaboratrices, en train de travailler sur des dossiers de fond, un ordi sur les genoux, soit dans la salle des Pas Perdus, soit dans la salle de conférences, attenante à l’hémicycle. Il nous arrive de travailler aussi à la bibliothèque… mais elle est en travaux actuellement. Il faut savoir qu’avec mes 4 collaboratrices, nous traitons plus de 100 e-mails par jour. » (en vignette : Travail sur le projet de loi de finance 2024 – octobre 2023)

20h : l’heure du break ! Mais pas de la pause…

« Parfois, quand je n’ai pas de dîner et que ma présence en hémicycle n’est pas obligatoire (par exemple pendant les périodes de discussions générales que je peux voir en replay) j’en profite pour filer chez moi, coucher mes deux enfants, qui ont 10 et 7 ans. C’est un moment que j’apprécie parce que je peux leur expliquer le texte que je vote, ou reparler d’une interview qu’ils auraient aperçue sur un plateau télé par exemple…

Mais sinon, cette pause d’1h30 est consacrée à des dîners avec des représentants diplomatiques de ma circonscription, ou, plus généralement, la règle, ce sont des dîners légers de travail, en Ministère, qui permettent d’avancer sur des sujets comme le budget, l’éducation, etc. »

21h30 : la cloche re-sonne…

« …Et jusqu’à minuit, je suis à nouveau en hémicycle, ce qui fait que je ne suis pas de retour chez moi avant minuit et demie. Si ma présence n’est pas obligatoire, alors il peut m’arriver de rentrer plus tôt, vers 22h, après avoir prolongé un peu mon dîner de travail. Il y a aussi les plateaux de télévision, puisque je suis depuis peu aussi porte-parole du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale. »

Le week-end ? Sacré !

« Le week-end, c’est sacré ! Il est consacré à mes enfants, à mon mari. Et puis, il faut dire aussi que le vendredi, nous avons moins de présences obligatoires à l’Assemblée. Cela donne un peu de souffle à mon agenda… Mais bien sûr, je m’adapte à l’actualité en permanence : un lancement de campagne, des événements, etc. Et puis, il y a un rendez-vous auquel je tiens, c’est le 1er samedi du mois, le zoom avec ma circonscription qui est très attendu. »

En circonscription, la journée type part en éclats…

On imagine un calendrier de déplacements prévu longtemps à l’avance… : « Oui, j’essaie en début d’année d’organiser en fonction des grands moments importants : inauguration, anniversaire (100 ans du Lycée de São Paulo par exemple) et je fais bien-sûr en sorte que ce soit calibré dans l’agenda familial… Mais il y a toujours des imprévus !

Par exemple, en février dernier, j’avais prévu d’être aux sports d’hiver avec mes enfants et mon mari… et j’ai dû partir accompagner le Premier Ministre en Argentine.

eléonore-Caroit- Députée des français de l'étranger - Chili

Il faut savoir qu’en circonscription, les journées sont encore plus denses qu’à Paris, souvent de 6h du matin à minuit. Avec des rendez-vous diplomatiques, mais aussi des visites de terrain : lycées français, visites au consulat, ambassades, rencontres avec des associations. Et dans l’avion ? Je profite d’avoir de longues heures devant moi pour travailler sur des dossiers de fond ! » (En vignette : Visite du Lycée français Jean-d’Alembert- Alliance Française de Valparaíso – septembre 2023)

Eléonore Caroit, votre message aux FemmExpats qui nous lisent ?

« Avant d’être élue, j’ai été expatriée, de plein de façons différentes. Je suis née à Paris, j’ai grandi à Saint-Domingue, j’ai étudié aux Etats-Unis. J’ai été française de l’étranger dans des pays dont j’avais la nationalité, expatriée dans d’autres pays, en tant qu’étudiante et en tant que femme active, et en tant que femme qui a dû suivre son mari, qui lui-même, est franco-suisse.

Je sais qu’une expatriation, c’est un projet de vie, c’est un projet de famille, et que c’est souvent des sacrifices de part et d’autre. Je sais que cela demande beaucoup de courage et beaucoup d’ouverture d’esprit. Je sais aussi qu’il n’y a pas une expatriation qui ressemble à une autre. Que toutes les formes de mobilité ont leur part de difficulté. »

Votre vision de la double carrière au sein d’un couple expatrié ?

« De plus en plus je me dis que ce n’est pas tellement l’équilibre en un instant T, mais un équilibre tout au long de la vie, qui compte. Lorsque j’ai eu des enfants, oui, j’ai mis ma carrière un peu en suspens, travaillé un peu moins, je suis sans doute passée à côté d’opportunités de carrière à l’époque, pour faire une inversion de la charge mentale aujourd’hui. Vous avez vu mon agenda, clairement, aujourd’hui, c’est mon mari qui s’occupe de tout. Je connais à peine le nom des instits de mes enfants, alors qu’avant, j’étais parent déléguée !

Eléonore Caroit Députée des Français de l'étranger

Il faut se dire que les carrières aujourd’hui ce ne sont plus que rarement des carrières linéaires. Et ce n’est pas parce qu’aujourd’hui on a l’impression qu’on n’est pas là où on devrait être, que demain, on ne va pas tout à coup être propulsée sur le devant de la scène. Il faut faire des réserves de moments de famille, des réserves de cocooning, mais aussi des réserves d’énergie folle, parce que la vie c’est ça, c’est un équilibre sur le long terme. »

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