Evelyne Renaud-Garabedian : « il faut soutenir et accompagner les entrepreneurs et entrepreneures français à l’étranger quel que soit la taille et le type d’entreprise qu’ils créent ».

Cela fait plus de 20 ans qu’avec la création du site FemmExpat et ses réseaux sociaux, nous nous battons pour l’employabilité des femmes expatriées. Le Covid a laissé la place à d’autres priorités et notamment l’accompagnement des expats isolés par la pandémie. Mais le sujet nous revient brutalement : les derniers éléments révélés par le Baromètre Expat Communication 2023 sur la difficulté des femmes à trouver leur place en expatriation le confirment. La situation professionnelle des femmes en expatriation reste un sujet crucial pour vous. Et croyez-nous, on ne va pas vous abandonner.

La chance que l’on a, quand on est Français de l’étranger, il faut le dire et le répéter, c’est que nous bénéficions d’un soutien institutionnel et politique que beaucoup de nos voisins nous envient. Conseillers consulaires, députés, sénateurs portent notre voix, sont à notre écoute et travaillent sans arrêt à faire évoluer lois, règlements et reconnaissance de nos droits.

Cela s’est vérifié la semaine dernière, lors de notre rencontre avec la sénatrice des Français de l’étranger Evelyne Renaud-Garabedian. Après avoir contribué largement au succès du lancement de la plate-forme Save You pour la prise en charge des violences conjugales et intrafamiliales, la voici porteuse, avec le sénateur Jean-Pierre Bansard, d’une proposition de loi visant à reconnaître et soutenir les entrepreneurs français à l’étranger. En quoi cette proposition va-t-elle dans le sens d’une meilleure prise en compte des préoccupations de toutes celles qui parmi vous se lancent dans l’entrepreneuriat (y compris dans l’auto entrepreneuriat !) à l’étranger ? Lisez l’interview !

entrepreneur français à l'étranger

Madame la Sénatrice, quelle est l’origine de cette proposition de loi ?

Lors de la pandémie de Covid 19, l’association que nous dirigeons avec Jean-Pierre Bansard, l’ASFE (Alliance Solidaire des Français de l’étranger), qui est interpellée quotidiennement par des centaines de concitoyens sur des sujets divers, a été saisie par de nombreux entrepreneurs français à l’étranger. Attention, on ne parle pas ici de filiales de grands groupes, mais de PME, de PMI, d’auto-entrepreneurs et auto-entrepreneures. Des agents de voyage, agents de tourisme, restaurateurs, etc…qui, du jour au lendemain, se sont retrouvés sans ressources car leur activité a été stoppée net. Alors que nous en France, nous étions aidés, que nous avons été maintenus en respiration artificielle grâce aux aide d’Etat, à l’étranger : rien.

Cette volonté de soutenir les entrepreneurs français à l’étranger est donc venue de là ?

C’est là que j’ai pris conscience des difficultés rencontrées par les entrepreneurs français à l’étranger (appelons-les EFE) pour rebondir et se développer après la crise. Suite à ces questions, nous avons conduit de nombreuses consultations (Bercy, BPI, etc) mais sans succès, car on ne sait pas précisément de qui on parle.

C’est là qu’est née l’idée de la création d’un statut spécifique pour les entrepreneurs français de l’étranger, y compris des personnes qui ne rentrent dans aucune structure juridique, comme les indépendants qui se lancent à leur compte, et je sais que c’est le cas de nombreuses de vos lectrices.

Quel est le but de cette future loi ?

Cette proposition de loi doit permettre, à terme, au plus grand nombre, hommes, femmes, de participer au commerce extérieur de la France, d’assurer le rayonnement de la France à l’étranger, de pouvoir être soutenus, et que l’on puisse leur apporter, à terme, les mêmes outils financiers que ceux  dont les grandes entreprises disposent pour leurs filiales de la part de l’Etat.

Mais avant de passer aux outils d’aide et de soutien, il est important de créer un statut. Et c’est pourquoi cette proposition de loi se veut simple, ne demande pas d’argent, mais définit un statut. Pour que les EFE soient reconnus, et accompagnés.

Cette proposition est donc composée de 3 articles seulement ?

  • L’article premier définit les critères d’identification d’un entrepreneur français à l’étranger. Pour le moment, il est question de 50% d’actionnariat détenu par un Entrepreneur Français à l’étranger. Mais les choses ont le temps de bouger. Car dans beaucoup de pays, comme nous l’avons dit plus haut, des guides, des coachs, des médecins, des professeurs de français ou autres ne créent pas de société à proprement parler et n’exercent qu’en tant qu’entrepreneurs, sous statuts différents. Pour autant, ils sont français, vendent un savoir-faire français.
  • L’article 2 définit le cadre du recensement des entrepreneurs français à l’étranger. Sans recensement, pas de promotion possible… Pour que l’on puisse faire appel à un Entrepreneur Français à l’étranger, encore faut-il savoir où le trouver ! Nous souhaitons donc inscrire la possibilité d’intégrer, une fois le statut accordé, un répertoire unique recensant par pays et par spécialité, les EFE. Ce recensement serait pris en charge par les ambassades, les consulats ou les attachés culturels et/ou économiques et par les opérateurs économiques français à l’étranger (chambres de commerce, conseillers du commerce extérieur).
  • L’article 3 crée le label « Made by French » à destination des entrepreneurs français à l’étranger. Ce 3e article a donc comme but d’attribuer un label, dont le nom est encore en discussion bien entendu, mais qui permette de distinguer une EFE.

Oui mais c’est tout ?

En dehors de ce statut, il faut apporter des outils financiers, bien sûr, qu’il faut préparer. J’y travaille en parallèle, et je voudrais par exemple faire inscrire, dans les statuts de BPI France, le soutien des Entrepreneurs Français de l’étranger. On ne dit pas combien, ni comment, mais on souhaite inscrire cette possibilité.

Une fois ce statut défini et attribué, qui sera l’interlocuteur de ces EFE ?

Les CCI prennent la main ensuite. Elles ont déjà travaillé avec les CCE depuis la pandémie (FemmExpat avait interviewé Charles Maridor en avril 2021) et les choses ont déjà bougé depuis le Covid avec la création d’EFE international. Une entrepreneure française, si elle devient actionnaire de cette entreprise de droit français, peut aujourd’hui employer un VIE dans les mêmes conditions qu’une filiale d’un grand groupe français.

Grâce à ce statut, les Entrepreneurs et entrepreneures français à l’étranger pourront ensuite, grâce au soutien des CCI, accéder aux mêmes outils financiers que les filiales de groupes français. À la fois auprès de Bpifrance avec des outils d’assurance prospection par exemple, ou auprès de banques françaises installées à l’étranger avec le financement de leur activité..

Quelles sont les prochaines étapes ?

La proposition de loi est déposée, mais nous poursuivons notre consultation auprès du plus grand nombre possible d’acteurs à l’international en attendant que celle-ci soit étudiée en commission. Nous espérons qu’elle le sera avant l’été. D’ici là, nous sommes à l’écoute des besoins de tous.

On peut encore nous écrire et nous alerter sur tous ces sujets pour améliorer encore ce texte. Par ailleurs, et comme le texte sera discuté, nous sommes preneurs aussi d’exemples concrets, pour étayer nos propos. Les femmes expatriées, qui accompagnent leurs maris rencontrent d’énormes challenges professionnels. Encore aujourd’hui, dans 9 cas d’expatriation sur 10, les conjoints suiveurs sont des femmes. S’il n’est pas toujours possible de faire bouger les lois de travail locales, comme en Afrique du Sud ou dans certains pays d’Asie, nous vos représentants, pouvons peut-être apporter une partie de la réponse avec ce dispositif de reconnaissance d’un statut d’entrepreneur et entrepreneures français à l’étranger. N’hésitez pas à interpeller l’ASFE dans ce sens !

👉Plus d’informations et une vidéo sur le site de l’ASFE.

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